Eaux fortes est votre film de fin d’études réalisé à l’Ecole de la Poudrière à Valence que vous avez suivie en formation continue…
Rémi Chayé : Tout à fait. J’ai été étudiant sur le tard. J’avais suivi une formation initiale à l’Ecole supérieure d’arts graphiques Penninghen, à Paris, et j’ai travaillé dans l’animation pendant six-sept ans comme storyboarder ou sur le lay-out comme technicien dessinateur [notamment sur L’île de Black-mor de Jean-François Laguionie]. On me proposait de plus en plus de responsabilités mais je ne me sentais pas compétent. J’étais totalement autodidacte et intuitif en ce qui concerne le langage cinématographique, l’histoire de l’animation, le montage, le son. Je n’étais pas prêt à réaliser. C’est grâce à l’Afdas (Assurance formation des activités du spectacle) que j’ai pu suivre les cours de La Poudrière, cette école fondée en 1999 par Jacques-Rémy Girerd. J’ai passé deux années absolument géniales et j’y ai reçu les outils essentiels pour transformer mes intuitions en savoir. Le spectre des enseignements va de l’art contemporain à l’animation commerciale.
Quelle est la genèse d’Eaux Fortes ?
C’est après une masterclass du dessinateur sud-africain William Kentridge que j’ai décidé de suivre son conseil d’inventer un film en marchant.

Comment avez-vous procédé ?
J’ai d’abord mis en place le film en croquis que j’ai ensuite animés. Puis, j’ai remonté le film en gardant la trace des premiers croquis restés en dessous, en transparence. J’essayais de pousser l’image le plus loin possible tout au long de la fabrication du film. C’est un film que j’ai fait avec très peu d’images par seconde - seulement huit. Il laisse apparaître le dessin.
On y sent aussi l’influence de Moebius, l’un de vos maîtres.
Eaux Fortes, c’est un vrai plaisir de dessinateur. J’ai appris à dessiner avec Moebius. Quand j’étais adolescent, je copiais ses dessins. Il m’a beaucoup influencé, y compris dans l’imaginaire avec des BD comme Le Garage hermétique.
Quel effet cela vous fait-il que le grand public découvre votre premier court métrage ?
De la fierté. Les courts des étudiants de la Poudrière sont généralement sélectionnés dans de nombreux festivals dans le monde entier. Le mien ne l’a pas été. Ou seulement dans un festival en Grande-Bretagne. Le savoir aujourd’hui à disposition du public c’est comme l’aboutissement d’une longue histoire. Et puis j’espère qu’il autorisera certains futurs réalisateurs de films d’animation à oser le dessin.