Découvrez "Motus", le court métrage d’Élodie Wallace

Découvrez "Motus", le court métrage d’Élodie Wallace

12 novembre 2020
Cinéma
Motus d'Elodie Wallace
"Motus" d'Elodie Wallace
Après des années de souffrance, Alice se décide à affronter celui qui l’a agressée enfant et qui est aujourd’hui mourant. Mais ce face-à-face tant attendu est bouleversé lorsqu’elle se perd dans les dédales de l’hôpital. Pour son premier court métrage, Élodie Wallace évoque avec pudeur et réalisme la libération de la parole. Sa productrice Laurence Méoc (2.4.7. Films) revient pour le CNC sur la genèse de Motus. Le film est disponible 48h sur notre site.

Le court métrage n'est plus disponible sur notre site.

Comment s’est faite votre rencontre avec Élodie Wallace ?

En plus d’être auteure, Élodie est comédienne. Je l’ai rencontrée par un ami commun qui lui a donné la réplique dans une pièce. Elle lui avait parlé du court métrage qu’elle développait et des difficultés qu’elle et son producteur de l’époque rencontraient pour le financer : ils avaient été recalés à tous les guichets de financement. Après avoir reçu son projet, j’ai eu un vrai coup de cœur pour ce film et la personne qui le portait. C’est le genre de courts métrages que j’ai envie de défendre, car il est important pour moi de donner accès aux spectateurs à de tels sujets pas toujours faciles.

Qu’est-ce qui vous a séduit ?

Dans Motus, elle évoque les abus sur enfants et la forme de complicité familiale inconsciente qu’on retrouve dans beaucoup d’affaires de ce type.

J’aimais la manière dont Elodie abordait ce sujet dramatique et grave, en mettant par moments un peu d’humour et de légèreté afin que le pathos ne prenne pas le dessus et que le spectateur n’ait pas envie de sortir du film.

À mon sens, il n’est pas facile de choisir ce biais-là pour raconter une histoire douloureuse qui touche le public de différentes manières même si personne n’y est insensible. Je trouve qu’Elodie a abordé ce sujet avec beaucoup d’intelligence en utilisant cette parabole du labyrinthe dans l’hôpital.

Alice (Sarah Suco) croise à plusieurs reprises une petite fille dans l’hôpital…

C’est la petite fille qu’elle a été et qui lui donne le courage d’aller affronter son agresseur. La première rencontre dans l’ascenseur entre Alice et cette enfant seule, qui lit un livre, est un peu incongrue. Puis, lorsqu’Alice quitte l’hôpital avec sa famille, laissant derrière elle cette possibilité d’obtenir des excuses de son agresseur, elle la croise de nouveau. Elle se dit alors qu’au nom de cette petite fille et de la douleur qu’elle a ressentie, enfant, elle ne peut pas renoncer. Elle retourne donc voir son agresseur.

Avez-vous influé sur le scénario lors de la production ?

Nous avons commencé à retravailler le script en 2016. J’ai demandé à Élodie de justifier tout ce qu’elle mettait dedans, qu’il s’agisse des paraboles, des sous-entendus, des rencontres ou des non-rencontres... Si un élément n’était pas justifié, il n’avait pas sa place pour moi, même si je suis friande d’absurdités qui peuvent aussi avoir un sens. Mais nous n’avions que 15 minutes pour raconter cette histoire et il fallait que ça tienne la route.

Comment s’est passée la recherche de financements ?

Lorsque j’ai commencé à collaborer avec Élodie, le projet était libre de droits et n’avait aucun financement. Je l’ai repris en l’état, sans rencontrer l’ancien producteur. Elle a écrit pendant un an et demi environ et il nous a fallu ensuite plus d’un an pour obtenir les financements. Notre demande d’aide avant réalisation du CNC a été refusée trois fois mais la commission nous a octroyé, lors de la première plénière, l'aide à l'écriture. Nous avons été aidées à l’automne 2017 par Pictanovo [un fonds d’aide de la région des Hauts-de-France, NDLR]. Avec cette seule aide supplémentaire, il nous était cependant impossible de faire Motus. Canal+ a finalement dit oui à un moment où nous étions sur le point d’abandonner. Fortes du soutien de la chaîne, nous avons déposé un dossier pour le COSIP [Compte de Soutien aux Industries de Programme, NDLR] que nous avons obtenu, puis nous avons eu une aide de l’ADAMI. Nous avons finalement pu tourner avec un budget de plus de 100?000 euros, mais le financement a pris quatre ans environ…

Motus est le premier court métrage d’Élodie Wallace qui est comédienne et metteuse en scène de théâtre. Cela a-t-il eu un impact sur votre collaboration et sa manière de travailler ?

Aucune. J’ai beaucoup collaboré avec des réalisateurs qui tournaient leur premier ou deuxième film. J’ai, par exemple, produit les courts métrages d’animation de l’illustrateur Jean Lecointre qui travaillait pour l’édition ou la presse, et qui n’avait pas d’expérience de cinéma en tant que telle. J’ai aussi travaillé avec un journaliste. J’aime ce genre de rencontres basées sur la confiance, où chacun amène un peu de lui et de son univers. De cette confiance découle l’humilité de se laisser accompagner. Dans le cas d’Élodie, la seule différence avec des personnes venues du cinéma c’est qu’elle n’avait pas de réseau dans ce milieu. Je l’ai donc beaucoup soutenue dans la constitution de son équipe. Comme elle me faisait confiance, elle était à l’écoute de mes recommandations. J’ai été présente sur le tournage sans être intrusive. Élodie a été accompagnée d’une équipe très investie avec notamment Julien Bullat, son chef opérateur, et Arthur Guerrand, son premier assistant à la réalisation. C’est une jeune femme qui a le talent de fédérer autour d’elle et l’intelligence de se laisser porter par les compétences de chacun tout en sachant ce qu’elle veut.