Celles et ceux qui ont eu un jour la chance de pousser les portes des laboratoires Éclair à Épinay-sur-Seine en gardent forcément un souvenir ému. L’impression, non feinte, d’entrer dans un temple qui envelopperait toute l’histoire du cinéma français. Une mémoire vive tant cette « histoire » ne cessait de se conjuguer au présent. Installés sur un domaine de plus de quatre hectares en plein cœur de la ville, les laboratoires offraient un cadre idéal avec sa forêt d’un hectare et ses 18 000 mètres carrés de bureaux. Et puis, à partir du début des années 2000, le numérique a peu à peu supplanté le celluloïd. L’obsolescence programmée de la pellicule a obligé les laboratoires Éclair à réduire leurs activités. En 2013, la famille Dormoy, propriétaire historique de l’entreprise, s’est vue contrainte de vendre le terrain qu’elle occupait depuis 1907. Un véritable choc pour la commune de Seine-Saint-Denis et ses habitants pour qui les laboratoires Éclair représentaient une immense fierté : « Voir le nom de notre ville au générique de la majorité des films français était incomparable, explique Hervé Chevreau, l’actuel maire de la ville. Épinay-sur-Seine a toujours eu un lien étroit et particulier avec l’industrie du cinéma. Le paradoxe, c’est que ce lieu était fermé aux habitants qui ne pouvaient évidemment pas y avoir accès. Les Laboratoires Éclair pouvaient employer jusqu’à huit cents personnes. »
Rendre l’endroit à la population
Dans un premier temps, la société Éclair avait regroupé sur le même site ses laboratoires et ses studios de cinéma où se déroulaient beaucoup de tournages. Très vite, les équipes se sont senties à l’étroit et ont déménagé dans des locaux à proximité. Les studios continuent d’ailleurs de fonctionner aujourd’hui. « Ils sont toujours pleins et veulent même s’agrandir en rajoutant un plateau, poursuit l’élu. Quant au site des laboratoires que la mairie a racheté en 2018, c’est un morceau de ville en plein cœur de la cité. » La mairie entend aujourd’hui faire du lieu un gigantesque espace culturel et de partage. Un projet avec des objectifs clairs : « La première des choses est de rendre l’endroit à la population. Très vite nous avons imaginé casser le grand mur qui sépare l’intérieur de l’extérieur du domaine, afin de créer une plus libre circulation. La place des Peupliers où Jean Gabin avait l’habitude de se reposer à l’abri des arbres entre deux prises sera ainsi accessible plus facilement. »
Objectif 2022
Ce lieu culturel se veut également très respectueux de l’environnement et chacun doit pouvoir y trouver sa place. L’art et la culture sous toutes ses formes pourront ainsi s’exprimer. Le modèle affiché est le Centquatre Paris. Avec leurs 18 000 mètres carrés de locaux, les anciens laboratoires Éclair pourront accueillir différents projets encore à définir. La mairie imagine déjà y installer le conservatoire de musique et de danse de la ville qui cherche justement à s’agrandir... En attendant, le site doit d’abord être rénové. La crise sanitaire a retardé le calendrier fixé et l’inauguration qui devait avoir lieu le 10 avril prochain avec un spectacle associant son, lumière et danse, imaginé par le musicien Nicolas Frize, a dû être reportée. Désormais, la mairie entend activer ce lieu culturel au printemps 2022. À suivre.
