Discours de Dominique Boutonnat à l'occasion de la Cérémonie des vœux 2024 du CNC

Discours de Dominique Boutonnat à l'occasion de la Cérémonie des vœux 2024 du CNC

09 février 2024
Professionnels
Discours de Dominique Boutonnat
Discours de Dominique Boutonnat, président du CNC, le 31 janvier 2024 lors de la cérémonie des vœux du CNC CNC

Discours de Dominique Boutonnat, président du CNC, prononcé le 31 janvier 2024 à l'occasion de la cérémonie des vœux du CNC.


Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Bonsoir à tous,

Ça me fait vraiment plaisir de vous retrouver ce soir.
Pour vous parler ce soir, j’ai tout de même relu mes vœux de l’année dernière, et je me suis rendu compte à quel point, à l’aube de 2023, qui était, on ne s’en souvient plus vraiment, la première véritable année post pandémie, à quel point nous retenions notre souffle.

De quoi 2023 serait-il fait ?
Est-ce que l’année 2023 serait l’année du grand rebond espéré ?

Et bien en réalité, on sentait une vraie incertitude autant pour nous, les pouvoirs publics, que pour vous, les professionnels :

  • L’explosion du coût de l’énergie
  • L’inflation galopante
  • Mais aussi est-ce que le retour en salles serait au niveau de la situation d’avant-crise ?
  1. Aujourd’hui, j’en suis heureux, cette incertitude est globalement levée. Pourquoi ?
  • d’abord parce-que, en 2023, on a réussi collectivement à réaffirmer de façon claire la force et le bien-fondé de notre modèle ;
  • et puis, les ambitions que j’avais affichées devant vous il y a un an exactement, on les a mises en œuvre ;
  • et enfin, nous faisons tous rayonner plus que jamais notre exception culturelle à l’international.

Ce sont donc ces trois facettes de notre action en 2023 sur lesquelles je voudrais revenir rapidement ce soir – sans être trop exhaustif car l’année a été dense.

1. D’abord, il a fallu, cette année encore, convaincre du bien-fondé de notre modèle


Et ce n’était pas gagné ! En 2023, nous avons été scrutés sous toutes les coutures. Pas moins de trois rapports ont été publiés à notre sujet : deux rapports du Sénat et un rapport de la Cour des comptes.

Que les choses soient claires : pour moi, cette attention est normale et elle est souhaitable.
D’abord, disons-le, c’est le corollaire de l’importance des moyens exceptionnels que la France consacre à sa politique publique en faveur du cinéma et de l’audiovisuel.

Et puis cette attention est aussi doublement salutaire :

  • politiquement, ça légitime notre « exception culturelle », car il faut quand même en rendre compte à nos concitoyens, c’est la moindre des choses ;
  • et pragmatiquement, ça nous pousse à réinterroger nos analyses et nos pratiques, et à nous améliorer sans cesse.

Pour autant, il ne faut pas se leurrer, dans un contexte budgétaire tendu comme aujourd’hui, c’était aussi un risque pour notre modèle – ou, a minima, pour le niveau de nos ressources. Or, ce risque, pour l’instant, n’a pas eu lieu. Même si, d’un rapport à l’autre, le ton et les préconisations ont pu varier, aucun n’a remis en cause notre modèle.

  1. D’abord, le rôle et le positionnement uniques du CNC, sous l’autorité directe de la ministre de la Culture et en contact permanent avec les professionnels, ont été réaffirmés.
  2. Ensuite, le mode de financement du CNC, grâce à des taxes affectées, a été conforté.
  3. Enfin, aucun n’a contesté les vraies réussites de politique publique de ce modèle.

Il faut dire d’ailleurs qu’elles ont été particulièrement éclatantes en 2023, ne serait-ce que par :

  • le niveau de fréquentation (181 millions d’entrées) ;
  • la part de marché des films français (à hauteur de 40%, sans équivalent en Europe) ;
  • et la diffusion, de plus en plus forte, de toutes nos œuvres à l’international.


Sans compter l’incroyable consécration de notre cinéma dans les plus grands festivals et, encore ces dernières semaines, par les distinctions les plus prestigieuses : je pense évidemment à Anatomie d’une chute, dont nous sommes tous tellement fiers, mais aussi aux documentaires Sur l’Adamant ou aux Filles d’Olfa et pour l’animation à Linda veut du poulet, Pachyderme et Letter to a  Pig.

D’autre part et d’un point de vue plus institutionnel, c’est d’avoir passé avec succès l’examen de la Cour des comptes et du Sénat qui nous a permis d’obtenir gain de cause auprès du Gouvernement et du Parlement, dans la loi de finances 2024, sur des sujets comme :

  • la prolongation anticipée du crédit d’impôt international, essentiel pour notre attractivité et notre crédibilité à l’étranger ;
  • et la reconduction à l’identique du dispositif des SOFICA.

C’est aussi la force de notre modèle qui nous a permis d’embarquer nos homologues européens et de convaincre, collectivement et tous ensemble, le Parlement européen, de ne pas remettre en cause le géoblocage, un vrai gain pour tous les ayants droit des œuvres françaises et européennes.

Maintenant, ça ne veut pas dire que tout est parfait évidemment, et que, désormais, on doit se reposer sur nos lauriers. J’y reviendrai tout à l’heure en esquissant les chantiers 2024.

C’est aussi cette confirmation du bien-fondé de notre modèle qui nous oblige au regard des enjeux RSE qui traversent notre société.

Pour n’en donner que deux exemples :

  • La ministre a annoncé récemment l’extension des formations à la prévention des violences sexistes et sexuelles pour l’ensemble des équipes de tournage de films.
  • Et sur la question environnementale, 2024 va être l’année de la complète entrée en vigueur de l’éco-conditionnalité de nos aides.

2. Après la confirmation du bien-fondé de notre modèle, le deuxième aspect que je souhaite retenir de 2023, ce sont les efforts qu’on a conduits pour mettre en œuvre les annonces et les ambitions que j’affichais devant vous en janvier dernier.

 

  • Ici, je veux revenir en premier lieu sur France 2030.

    En janvier 2023, je vous parlais de cet appel à projets d’une ampleur unique, « La Grande fabrique de l’image », pour faire de la France un leader mondial en termes de capacités de tournages et de formation dans nos secteurs – bref, pour assurer notre souveraineté créative, et surtout notre souveraineté en matière de fabrication de nos œuvres. C’est essentiel.

    Au-delà d’un soutien aux infrastructures de tournage, aux studios numériques et au processus de transition écologique, nous souhaitions, dans « La Grande fabrique de l’image », rendre nos formations accessibles à tous les profils, sur tout le territoire, sans barrière à   l’entrée. Car nos filières ont tous les atouts pour jouer un rôle fort d’intégration. C’est un vrai changement dans un secteur très concentré autour de la capitale.

    Un an plus tard, cette ambition prend forme ! 68 lauréats ont été annoncés en mai dernier et, avec la Caisse des dépôts nous sommes en train d’achever leur conventionnement.

    Les premières aides ont déjà été versées et le rythme va s’accélérer dans les semaines à venir : les nouveaux studios ouvriront en cours d’année 2024, ce qui permettra de limiter les contraintes de tournage liées aux Jeux olympiques.

    A Marseille, par exemple, qui a fait l’objet d’un effort spécifique dans le cadre du programme « Marseille en grand », les premières réalisations sont déjà sorties de terre (l’école CinFabrique, une base logistique entre autres).

    C’est pour moi une satisfaction vraiment extraordinaire de constater qu’un plan aussi ambitieux puisse aboutir si vite et si bien !

  • La deuxième concrétisation phare de 2023, c’est que nous avons su donner vie à L’Année du documentaire.

    Vaste ambition !

    D’abord pourquoi le documentaire ? On sait à quel point aujourd’hui c’est fondamental de pouvoir décrypter le monde qui nous entoure. De cerner les enjeux complexes de l’actualité, de les restituer au sein de véritables œuvres de création : c’est évidemment capital pour nourrir le débat démocratique dont nous avons particulièrement besoin en ce moment. Et ce d’autant plus que nos documentaires témoignent souvent en France d’une expertise très forte.

    Alors pour traduire cette ambition, nous avons coordonné, avec la Cinémathèque du documentaire et la Scam, la mise en œuvre de L’Année du documentaire. Elle a donné lieu à de nombreuses opérations sur lesquelles je ne vais pas revenir, sur tout le territoire, pour favoriser le plus possible la visibilité de ce genre. Mais nous avons aussi renforcé au CNC nos soutiens, très significativement et de manière pérenne.

  • Un autre sujet majeur de l’année, c’est la concrétisation progressive des recommandations du rapport Lasserre sur la diffusion des films en salles.

    Je vous en parlais l’année dernière. Et c’est un rapport que nous avions initié au CNC et que Bruno Lasserre nous a remis en avril dernier, qui recommande une modernisation de l’encadrement de la sortie des films en salles, sous tous ses aspects : engagements de programmation, engagements de diffusion, cartes illimitées, soutien à l’Art et Essai. Tout un ensemble de préconisations très équilibrées : il s’agit de donner plus de liberté aux professionnels pour s’adapter au nouveau contexte, tout en maintenant une ambition intacte en matière de diversité, qui fait notre ADN français.

    Sur ce front, les choses ont encore bien avancé !

    Au CNC, on va définir très bientôt de nouvelles lignes directrices pour les engagements de programmation, et les concertations avancent à fière allure dans le domaine de l’Art et Essai – je vais revenir sur ce point dans un instant. Ces deux chantiers, je veux qu’ils soient achevés avant Cannes prochain.

    Un an plus tard, tout le champ de l’audiovisuel est désormais couvert. Bravo ! Qu’il s’agisse du documentaire, de la fiction ou de l’animation, quatre accords ont été conclus qui prévoient notamment des rémunérations minimales.

    Il reste désormais le cinéma, et nous serons très vigilants pour que les négociations aboutissent le plus vite possible dans les quelques mois à venir, entre producteurs et auteurs.

    • Un décret a été pris cet automne qui permet, dès aujourd’hui, des innovations sur les cartes illimitées.
    • Et une proposition de loi, qui concerne à la fois les engagements de diffusion et une liberté supplémentaire pour les cartes illimitées, est sur le point d’être examinée au Sénat.

3. Après la confirmation de notre modèle et la concrétisation de nos ambitions, le troisième point que je retiens de 2023, ce sont nos accomplissements pour faire rayonner notre modèle à l’international.

i. Faire rayonner notre modèle, ça veut dire quoi ? C’est par exemple déjà mener une politique d’attractivité, faire de la France une terre incontournable de tournages et de formation.

Cette année, on a réalisé par exemple des actions de communication ciblées auprès des studios américains.

Nous avons aussi créé, dans un autre domaine, celui du jeu vidéo, « Game France ». « Game France » c’est quoi ? C’est une marque, ambitieuse, pour accroître la visibilité du jeu vidéo français à l’international et de promouvoir nos créations, nos talents, nos entreprises et notre crédit d’impôt.

ii. Faire rayonner notre modèle, c’est aussi nouer des liens plus étroits avec nos partenaires étrangers.

  • Cette année, nous avons ainsi lancé une Académie France-Corée avec notre homologue sud-coréen du KOFIC, dans l’optique de renforcer les échanges entre les professionnels de nos deux pays.
  • On a également signé, en novembre dernier, un accord de coopération avec l’équivalent taïwanais du CNC, TAICCA, là encore pour organiser des actions concrètes entre nos professionnels et pour encourager les coproductions. Et ça porte déjà ses fruits : avec plusieurs coproductions, des échanges de professionnels, et des ateliers que vous allez pour certains découvrir à Séries Mania.

iii. Faire rayonner notre modèle, c’est enfin et surtout soutenir la création d’où qu’elle vienne, et donc soutenir les cinéastes du monde entier.

  • Bien sûr avec l’Aide aux cinémas du monde, dispositif dont nous sommes très fiers et que nous venons tout juste de réformer. Depuis la création de l’ACM, sur l’ensemble des films soutenus par ce dispositif, deux tiers ont été présentés dans l’un des quatre festivals majeurs de cinéma : Venise, Berlin, Locarno et Cannes ! Seule la France peut s’en prévaloir.
  • Cela passe aussi par nos initiatives plus ciblées en faveur des artistes dont la liberté de création est entravée dans leur pays d’origine.
  • à l’image du Fonds Ukraine, initié par le CNC et que la France a porté en Europe : elle a embarqué avec elle une quinzaine de pays européens !
  • Ou bien notre programme Caméra libre.

    Tous deux étant réédités en 2024.

Voilà, il me semblait essentiel de souligner à quel point, après le doute des années covid, 2023 a été l’année de confirmation, de modernisation et de déploiement de notre modèle avec en plus, des succès inédits.

II. 2024. Il nous faudra, en 2024, continuer dans cette voie, et toujours en suivant les trois axes stratégiques qui guident notre action : diffuser, créer et protéger.

1. Pour moi, la priorité cette année, c’est la réforme de nos soutiens à la diffusion, pour rendre encore plus accessible la diversité de notre production au plus large public, sur tout le territoire et aussi à l’international.

C’est vrai, certaines œuvres soutenues par le CNC ne sont pas assez vues : ce constat qu’on nous a opposé, il n’y a évidemment pas matière à le contester. Mais ma conviction, je le dis et le redis, c’est que la réponse à cette préoccupation passe par une meilleure exposition de ces œuvres, plutôt que par une restriction de leur nombre.

Autrement dit, plutôt que de chercher à réduire l’offre comme nous y invitent certains – sans d’ailleurs jamais nous préciser comment – il faut créer l’envie chez le public : et aller chercher le public là où il est, où les publics.

i. Cela suppose, bien entendu, que cette offre diverse atteigne le public sur l’ensemble de notre territoire.

On ne part pas de rien, loin de là : on a la chance d’avoir en France un maillage territorial incomparable de salles et d’associations telles que festivals, cinémathèques, ciné-clubs ou circuits de cinémas itinérants, qui diffusent les œuvres partout et sous toutes leurs formes, pour les publics des quartiers politiques de la ville, des hôpitaux, des maisons de retraite, des maisons d’arrêt, dans les écoles – et j’en oublie !

Mais aujourd’hui, et notre ministre le rappelait dans ses vœux avant-hier, au moment où l’égalité de tous dans l’accès à la culture est au cœur des préoccupations de nos concitoyens, il faut renforcer notre soutien à ces acteurs irremplaçables de la diffusion au plus près du terrain. Ce sera ma priorité pour cette année.

1) Alors comment ? C’est dans cet esprit que nous allons mener à bien la réforme ambitieuse de l’Art et Essai que j’ai déjà évoquée. Notre but est de renouer avec l’objectif fondamental de ce dispositif, qui est de soutenir davantage les salles proposant une programmation audacieuse, et aussi accompagnée d’un vrai travail d’animation.

Nous allons donc mieux récompenser les exploitants qui choisissent de donner leur chance à des films peu diffusés plutôt que de privilégier les films aux plans de sortie très larges.

Mais nous allons aussi mieux valoriser ceux qui mènent une politique d’animation pour attirer le public, notamment au travers de ciné-clubs.

2) C’est dans cet esprit aussi que je veux engager un plan de soutien, en fonctionnement et investissement, aux circuits de cinémas itinérants. L’idée est de leur permettre, d’une part, d’étoffer leurs effectifs, d’autre part de financer le renouvellement et le développement de leur parc de matériel, qu’il s’agisse de véhicules ou de projecteurs.

3) C’est aussi dans cet esprit que nous allons poursuivre notre soutien aux festivals, notamment en réévaluant les moyens de festivals quand ils touchent le public régional, pour leur permettre de développer une animation culturelle dans ces territoires tout au long de l’année.

4) Et c’est pour ça également que je souhaite généraliser sur tout le territoire le recrutement de médiateurs, en partenariat avec les collectivités territoriales.

Vous le savez, on expérimente depuis plusieurs années l’implantation en régions de médiateurs auprès de réseaux de salles de cinéma. Ça marche.

L’effet de cette mesure sur la fréquentation est avéré puisqu’elle se traduit en moyenne par une hausse de 30% des entrées.

Aujourd’hui, on en a une petite centaine de médiateurs qui sont répartis sur le territoire, en fonction du dynamisme des collectivités partenaires puisque le mécanisme est en principe cofinancé par les régions.

Je me fixe l’objectif ambitieux de doubler le nombre de ces médiateurs dans les mois à venir pour couvrir des zones aujourd’hui non pourvues. On compte beaucoup sur la participation des régions, mais quoi qu’il en soit, on mettra les moyens nécessaires pour aboutir cette démarche.

5) Enfin, cette année 2024 sera aussi l’occasion de renforcer nos dispositifs d’éducation à l’image et de médiation, qui constituent le meilleur vecteur pour renouveler les publics et entretenir la cinéphilie.

J’aurai l’occasion de revenir vite vers vous avec un programme plus détaillé sur le sujet.

ii. Je viens de vous parler de la diffusion de proximité, géographique, territoriale, mais la diffusion doit aussi passer par tous les supports.

Il faut donc inciter par exemple les producteurs à donner à leurs œuvres toute l’exposition qu’elles méritent, et pas seulement en salles.

C’est pourquoi, nous comptons mettre en place un nouveau « retour » qui permettra à ces producteurs de générer du soutien automatique à raison de la mise à disposition de leurs films sur des plateformes, à l’acte ou par abonnement.

La diffusion en ligne sera ainsi valorisée à l’image de ce qui existe déjà pour les autres modes d’exploitation. Cette évolution devrait permettre d’accentuer encore la présence de nos films sur ces services, et donc leur accessibilité au public le plus large.

iii..Enfin, la diffusion, c’est aussi la diffusion de nos œuvres à l’international.

  • C’est pour ça que j’ai décidé de réarmer Unifrance, avec un million d’euros supplémentaires dès 2024.
  • C’est pour ça aussi qu’il est temps, presque trois ans après son entrée en vigueur, de faire le bilan du décret SMAD. Pour s’assurer que les objectifs ambitieux que nous poursuivons sont bien atteints, et que les plateformes respectent non seulement la lettre du décret mais aussi son esprit. Et ce travail de bilan, nous allons le mener de concert avec l’ARCOM.

La diffusion de nos œuvres cinématographiques et audiovisuelles sur tous les territoires, en France comme à l’international, et sur tous les supports, pour permettre un accès de tous à cette formidable richesse, ce sera donc le premier chantier de 2024. Et c’est ce chantier, qui donne du sens à tout le reste de notre politique.

2. Après l’axe « diffuser », maintenant je vais parler de l’axe « Créer » Le deuxième chantier, après la diffusion, c’est l’ajustement de nos dispositifs pour qu’ils accompagnent au mieux le risque de création. C’est en effet lorsque le risque – artistique et économique – est le plus grand, que la légitimité de notre intervention, l’intervention publique, est la plus forte. Deux exemples pour illustrer mon propos.

i. D’une part, nous venons tout juste de faire évoluer nos soutiens à l’écriture et au développement des œuvres audiovisuelles.

L’objectif qui nous a guidés a été de mieux soutenir davantage les auteurs et les producteurs dans cette phase dite « amont » de la création, qui est évidemment la plus risquée. Cette réforme de nos dispositifs – qui s’est accompagnée d’un effort budgétaire supplémentaire conséquent – va être mise en œuvre dès le début de cette année.

ii. D’autre part, c’est également avec l’idée de mieux accompagner le risque que prennent les distributeurs. Et c’est dans cette idée là que nous venons de lancer une mission sur le secteur de la distribution cinéma, confiée à Jean-Paul Cluzel.

Cette mission, dont les conclusions seront rendues à Cannes, devra dresser un état des lieux de ce maillon essentiel, qui assume une part importante des risques liés à la sortie en salles. Nous en tirerons des pistes d’amélioration de nos dispositifs de régulation comme de soutien. Et j’aimerais fixer comme objectif que ces modifications nous puissions les mettre en œuvre d’ici à la fin de l’année.

3. Diffuser, Créer, Protéger…Le troisième chantier, après la diffusion et l’accompagnement du risque, c’est garder – toujours – un temps d’avance en anticipant les enjeux qui seront décisifs demain pour protéger nos œuvres, nos auteurs, nos entreprises.

i. Au nombre de ces enjeux figure bien sûr l’intelligence artificielle. Sur ce sujet essentiel, le rôle du CNC est triple.

a. D’abord, même si cela n’est pas toujours visible vis-à-vis de l’extérieur, nous portons dans la discussion interministérielle les préoccupations qui nous sont chères – et en particulier la protection du droit d’auteur – pour que ces préoccupations se reflètent dans les textes, nationaux comme européens.

b. Ensuite, notre rôle est aussi de contribuer à une discussion publique éclairée sur les enjeux liés à l’intelligence artificielle : déjà objectiver les impacts réels, débusquer ce qui relève pour l’heure du fantasme – parfois même de la science-fiction. C’est tout le sens de l’étude que nous sommes en train de conduire, qui permettra de cartographier la réalité des usages dans les différents métiers. Nous animerons aussi des sessions pédagogiques, pour faire découvrir les possibilités ouvertes par à l’intelligence artificielle en matière de création, de production et de diffusion.

c. Enfin, pour le CNC, il nous faut commencer à réfléchir aux conséquences de l’intelligence artificielle sur nos soutiens, en identifiant à la fois les évolutions à accompagner et les garde-fous à ériger.

ii. Autre enjeu décisif : la création immersive.

Aujourd’hui, le CNC contribue, avec BpiFrance, au nouvel appel à projet « Culture immersive et métavers » dont la ministre a annoncé la publication avant-hier et qui vise, sur le modèle de la grande fabrique de l’image, à soutenir les initiatives les plus ambitieuses en matière de production et de diffusion d’expériences immersives.

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Chers amis, au terme de ce tour d’horizon, comme vous le constatez, l’action du CNC est une sorte de kaléidoscope : à chaque époque, elle se présente suivant une configuration nouvelle et, pourtant, ce sont toujours les mêmes éléments qui la composent, à savoir : créer, protéger et diffuser la création française dans toute sa diversité.

C’est ce paradoxe apparent – l’adaptation permanente dans la stabilité – qui constitue la spécificité de notre modèle, et le meilleur gage de son succès.

Et c’est avec vous, en travaillant ensemble, comme toujours, pour continuer à défendre ce modèle et son exceptionnelle réussite.

Et pour célébrer 2024 et les beaux évènements qu’elle nous promet, je vous propose maintenant un montage réalisé par le CNC, à partir d’images mises à disposition et restaurées par le fonds Gaumont Pathé Archives – que je remercie chaleureusement – autour des Jeux olympiques de Paris 1924. Le tout composé et interprété par la violoniste Electra Drossos.

Je vous remercie.