Gaëtan Bruel, Président du CNC, félicite chaleureusement toutes les parties à « l’Accord interprofessionnel sur les pratiques contractuelles entre auteurs-scénaristes et producteurs d’œuvres cinématographiques de long-métrage de fiction », signé ce jour au CNC par l’ensemble des organisations représentatives des producteurs de cinéma (Association des producteurs indépendants - API, Syndicat des producteurs indépendants - SPI et Union des producteurs de cinéma - UPC) et, pour ce qui regarde les auteurs, par les Scénaristes de cinéma associés (SCA), la Société des réalisatrices et réalisateurs de films (SRF), la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) et la Société civile des auteurs, réalisateurs et producteurs (ARP).
Pour mémoire, la France a transposé de façon ambitieuse la directive « droit d’auteur » en mettant en place, par une ordonnance du 12 mai 2021, un mécanisme de négociation inédit entre auteurs et producteurs, destiné à aboutir à des accords interprofessionnels dans le champ du cinéma et de l’audiovisuel, visant une meilleure reconnaissance de la place des auteurs dans le processus de création et un partage plus équitable du risque et de la valeur. Ces négociations se déroulent sous l’égide du CNC et les accords qui en résultent peuvent être étendus à l’ensemble du secteur visé par arrêté de la ministre de la culture.
S’agissant de l’audiovisuel, quatre accords ont déjà été conclus concernant les scénaristes du documentaire, de la fiction et de l’animation, ainsi que les réalisateurs de fiction – et des discussions sont en cours pour les réalisateurs du documentaire.
L’accord signé aujourd’hui au CNC est donc le premier à concerner le champ du cinéma. Il porte sur la situation des auteurs-scénaristes des films de long métrage de fiction, c’est-à-dire aussi bien des réalisateurs pris en leur qualité de scénaristes, que des scénaristes non réalisateurs.
L’accord contient principalement deux séries de stipulations, respectivement relatives à la reconnaissance de la place des auteurs-scénaristes et à leur rémunération.
I. En ce qui concerne la reconnaissance de la place des auteurs-scénaristes dans le processus de création, l’accord renforce leur visibilité au sein de la profession et auprès du grand public. Il prévoit notamment la mention au générique de début du film, lorsque les noms du réalisateur et du producteur y figurent, de celui des auteurs-scénaristes ayant participé à au moins trois étapes de l’écriture. En outre, les auteurs-scénaristes devront également être mentionnés sur les outils de communication, comme l’affiche du film et le dossier de presse, dans lequel ils devront être mis en avant de manière significative.
II. En ce qui concerne la rémunération, l’accord institue trois mécanismes dont la combinaison améliorera très significativement la rémunération des auteurs scénaristes, notamment les plus jeunes et les plus fragiles : a) une rémunération minimale que le film se fasse ou pas, b) une indexation de la rémunération en fonction des financements externes obtenus par le producteur, c) une rémunération complémentaire systématique en fonction de l’exploitation du film une fois celui-ci amorti :
a) Un Minimum Garanti d’Ecriture « plancher » (MGEP) assurera aux scénaristes une rémunération minimale durant tout le travail d’écriture, que le film se fasse ou non. Ce mécanisme inédit constitue donc une avancée considérable qui protégera particulièrement les auteurs les plus précaires et notamment les auteurs émergents.
Les montants de ces niveaux « planchers », qui envisagent trois cas de figure (réalisateur écrivant seul, avec un coscénariste, ou avec deux coscénaristes) ont été fixés à des niveaux (respectivement 17.000 euros, 13.600 euros par auteur et 11.000 euros par auteur) qui amélioreront significativement la rémunération des auteurs les plus fragiles telle qu’elle est aujourd'hui constatée par le CNC. Ainsi, au regard de la rémunération moyenne des premiers longs-métrages agrées de l’année 2023, les niveaux fixés par l’accord améliorent la situation de 35% des réalisateurs écrivant seuls et de 63% des coscénaristes.
Enfin, l’effet structurant du MGEP consiste aussi dans le fait de normer les échéances de paiement, par des calendriers qui garantissent une rémunération mieux répartie pendant la phase d’écriture. Le MGEP constitue donc, non seulement un mécanisme de rémunération minimale, mais également un outil qui assure aux auteurs d’être rémunérés plus tôt.
b) Une indexation minimale permettra d’adapter le niveau du minimum garanti, négocié entre le producteur et l’auteur-scénariste, à l’économie du film, puisque cette indexation sera calculée sur les financements externes obtenus par le producteur.
L’indexation interviendra à compter de l’agrément des investissements, donc bien en amont de l’exploitation de l’œuvre : elle garantira à l’auteur, là encore, une rémunération plus précoce.
Les taux d’indexation prévus par l’accord améliorent significativement la rémunération de l’écriture telle que constatée à ce jour par le CNC. En effet, si l’on se réfère à nouveau à l’ensemble des premiers longs métrages agrées en 2023, la moitié de ces films ne prévoyaient pas d’indexation et pour la moitié des films qui en prévoyaient une, le taux d’indexation de 2,5, prévu dans l’accord pour la majorité des cas aboutira à une amélioration substantielle.
En outre, l’accord systématise cette indexation, qui sera négociée de gré à gré, pour les films qui ont un budget supérieur à 6 M€ : là encore, il s’agit d’une véritable avancée par rapport aux pratiques constatées, qui garantira l’adaptation de la rémunération à l’économie du film.
Enfin, l’accord apporte également des précisions essentielles sur les modalités de calcul de cette indexation puisque le producteur communiquera aux auteurs qui en bénéficient le plan de financement remis à l’agrément des investissements complété du détail des financements externes, et qu’une chronologie claire où les frais généraux devront être couverts avant le salaire producteur est également prévue.
III. Le contenu de l’accord rend par ailleurs possible la mise en place effective d’un observatoire de l’évolution de la rémunération des auteurs.
En effet, grâce à la définition d’échéances de paiement, il sera désormais praticable pour les organisations professionnelles ou pour le CNC de mener des études destinées à suivre finement l’évolution de la rémunération des auteurs. Ce point est important car il existe des différences significatives de rémunération entre hommes et femmes qu’il sera nécessaire d’objectiver afin d’envisager collectivement les leviers pour les résorber.
« L’écriture est le cœur de notre création et de son renouvellement : il est donc dans l’intérêt général de la filière que le rôle des auteurs soit pleinement reconnu et que leur rémunération reflète ce rôle. C’est pourquoi cet accord constitue une grande victoire collective du cinéma français, le témoignage d’une cohésion particulièrement nécessaire pour affronter les nombreux défis qui nous attendent » déclare Gaëtan Bruel.
