« La Baule-les-Pins », ou l’art de mettre en scène une cité balnéaire

« La Baule-les-Pins », ou l’art de mettre en scène une cité balnéaire

30 août 2019
Cinéma
La Baule les Pins
Fin août 1989, Diane Kurys tourne son cinquième film. Son nom ? Celui d’une station balnéaire de la côte atlantique où, enfant, elle allait passer ses vacances : La Baule-les-Pins.

Après Diabolo Menthe et Cocktail Molotov, Diane Kurys puise une nouvelle fois son inspiration dans ses souvenirs pour raconter les bonheurs et les blessures d’enfance. Avec le récit des grandes vacances en bord de la mer, lieu idyllique des émois juvéniles, la réalisatrice dépeint les prémices de l’amour, les premières cigarettes et surtout la confrontation avec le monde des adultes. A travers le regard d’enfants, la déchirure d’un couple prend une intensité toute particulière. Dans la station balnéaire de La Baule-les-Pins, aux parfums de l’enfance retrouvée, Diane Kurys tisse avec des détails faussement anodins la trame d’un drame qui ne l’est pas.

La réalisatrice s’est entourée d’un casting quatre étoiles pour ce film choral. Nathalie Baye, Jean-Pierre Bacri, Vincent Lindon, Richard Berry, Valeria Bruni-Tedeschi et Zabou Breitman font ainsi partie de la distribution. L’autre point fort du film : son unité de lieu. A l’image d’une tragédie classique, la réalisatrice a situé son long métrage dans la ville de La Baule-les-Pins, seul et unique décor du film, comme pour mieux croiser les destins des personnages. Elle a posé ses caméras sur la plage, en pleine saison, pour mieux capter le soleil d’été et l’agitation du littoral. Évidemment, cela n’a pas été sans tensions. Comment imaginer que le tournage d’un film d’époque puisse cohabiter avec la frénésie des vacanciers de la fin des années 1980…

Un coup de projecteur bénéfique

On sait aujourd’hui précisément les liens étroits qu'entretiennent les tournages (cinéma et séries), et le développement touristique d'une région ou d'une ville. Il y a les retombées directes des tournages (figuration, hôtellerie, transport, emploi de techniciens locaux, location de lieux…) et les nombreuses retombées indirectes (l’augmentation de la fréquentation touristique, la couverture presse...). Pour Yves Métaireau, le maire de La Baule-les-Pins, le film a d’abord contribué à la notoriété de la station. L’édile était à l’époque adjoint chargé du tourisme auprès du maire Olivier Guichard. « Cela coïncidait avec l’arrivée du TGV. Le film a marqué un tournant pour la ville ; il a permis d’affirmer un peu plus, auprès du grand public, l’image familiale du tourisme baulois. » Il poursuit : « Cela a été très bénéfique, notamment pour la mise en valeur des villas de La Baule. Nous avons protégé 4000 villas dans le style du début du XXe siècle - comme celle qui figure dans le film - qui étaient remarquables. Ce tournage a profité concrètement à l’ensemble de l’urbanisme balnéaire de la commune. »

La Baule-les-Pins n’est pas la seule œuvre de fiction à avoir choisi comme décor la courbure de la longue baie au sable blanc, ou les villas magnifiques de la ville. Onze ans plus tard, 15 août de Patrick Alessandrin remet la station à l’affiche. L’histoire est celle de trois pères qui se retrouvent dans l’obligation de s’occuper de leurs enfants et de l’intendance de la maison pendant les vacances, leurs femmes ayant pris la poudre d’escampette. Richard Berry, Jean-Pierre Darroussin et Charles Berling composent ce trio de vacanciers dépassés par les événements. De manière notable, ce film, à l’instar de certaines séries étrangères, a permis aux acteurs du tourisme de mieux se faire connaître et surtout d’améliorer certaines infrastructures. « Régulièrement, note Ingrid Perrais, de l’Office de Tourisme intercommunal La Baule - Presqu’île de Guérande, on vient nous demander où sont les villas dans lesquelles ont été tournés les films. » Commissaire Dupin, une série policière allemande très suivie outre-Rhin, fait par exemple l’objet d’un parcours explicatif.

Autre film-clé pour La Baule, La Conquête (2011) de Xavier Durringer qui retrace la campagne électorale de Nicolas Sarkozy pour la présidentielle de 2007. C’est à La Baule que, le temps d’un footing, l’affrontement entre Dominique de Villepin et Nicolas Sarkozy avait atteint son sommet. Yves Métaireau se souvient avoir assisté à la scène réelle et celle de fiction. « Je les ai rencontrés ce jour-là. Sarkozy était particulièrement agacé par l’attitude de Villepin qui était parti se baigner et l’avait fait attendre près d’une heure. Le film retrace parfaitement bien l’ambiance glaciale qui régnait entre les deux hommes politiques à l’époque. » Il se souvient également que le tournage a permis l’embauche de 80 figurants. « Les retombées économiques d’un tournage dans une région sont très importantes. Je trouve qu’il ne s’en tourne pas assez en Pays de la Loire. »

Un dispositif spécial tournage

A cet égard, la région est passée à l’offensive depuis une dizaine d’années avec la création d’un Bureau des tournages. Pauline Le Floch, la responsable, édite à l’attention des professionnels un guide pour leur faciliter la tâche. Aide aux repérages, listings de services et de talents, organisation de castings, mise à disposition de locaux : tout est mis en œuvre pour répondre aux besoins des professionnels de cinéma. « On a participé cette année au salon des tournages à Paris au mois de janvier et j’y ai noué des contacts prometteurs. Le tournage d’un film est vraiment une très belle valorisation pour notre territoire », conclut Ingrid Perrais.