La représentation de l’esclavage à l’écran

La représentation de l’esclavage à l’écran

10 mai 2021
Cinéma
Vénus Noire d’Abdellatif Kechiche - MK2
"Vénus Noire" d’Abdellatif Kechiche MK2
A l’occasion de la « journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leur abolition » et des 20 ans de la loi Taubira tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité (21 mai 2001), retour sur sept films hommages aux victimes de l’esclavage et de la traite transatlantique.

Tamango de John Berry (1958)

Tamango de John Berry StudioCanal
Tamango, film franco-italien réalisé par John Berry en 1958, est adapté de la nouvelle éponyme de Prospère Mérimée (1829). Le titre renvoie au nom du protagoniste, esclave sur un négrier, qui tente de fomenter une révolte. L’adaptation prend des libertés par rapport au livre en occultant l’ancien rôle de vendeur d’esclaves du protagoniste qui vend sa femme à un autre homme. Dans le long métrage, le rôle de vendeur d’esclave est tenu par un autre personnage pour que Tamango soit le véritable héros de l’histoire. La mise en scène recherche un certain réalisme pour dépeindre les réalités terribles de la traite négrière et la volonté puissante de liberté des esclaves.

Onkel Toms Hütte de Géza von Radványi (1965)

Onkel Toms Hütte ou La Case de l’oncle Tom est une adaptation du roman-fleuve d’Harriet Beecher Stowe contant la dramatique histoire d’une famille noire déchirée par l’esclavage dans le Sud des États-Unis avant la Guerre de Sécession. Le film, réalisé par Géza von Radványi en 1965 - dont la réalisation est à la fois française, italienne, yougoslave et ouest-allemande - est tourné principalement en Yougoslavie pour les scènes d’intérieur et aux États-Unis pour les extérieurs. Il s’agit du dernier rôle de John Kitzmiller, qui interprète l’oncle Tom.

Onkel Toms Hütte ou La Case de l’oncle Tom DR

Rue Cases Nègres d’Euzhan Palcy (1983)

Rue Cases Nègres est un film français réalisé par Euzhan Palcy et adapté du roman de Joseph Zobel La Rue Cases-Nègres (1950). La réalisatrice martiniquaise a obtenu pour ce premier long métrage plusieurs prix, dont le Lion d'Argent en 1983 et le César de la meilleure première œuvre en 1984. L’histoire se déroule au début des années 1930, en Martinique, dans le quotidien des ouvriers agricoles. Le personnage principal, un enfant martiniquais, est poussé par sa grand-mère à étudier au collège, puis aidé à entrer au lycée. L’histoire s’intéresse à l’accès à l’éducation des populations martiniquaises en marge de la métropole.

Rue Cases-nègres d'Euzhan Palcy JMJ International Pictures

Vivre libre ou mourir de Christian Lara (1980)

En 1980, le réalisateur Christian Lara signe la comédie dramatique, Vivre Libre ou mourir. L’histoire prend place lors d’un procès accusant le commandant Ignace de rébellion. Cet homme défend alors les libertés de chacun dans une ode à la libération des populations. Le réalisateur, petit-fils d’Oruno Lara, qui fut le premier historien de Guadeloupe, et fils d’un esclave affranchi en 1848, décide de mener des créations antillaises pour permettre à ses compatriotes caraïbéens de « se voir et d’être vus ». Christian Lara a d’ailleurs puisé les éléments de son récit dans une enquête de son grand-père à qui le film est dédié.

Vivre libre ou mourir de Christian Lara Caraïbe Films

Passage du milieu de Guy Deslauriers (2001)

Passage du milieu de Guy DeslauriersKreyolimages
Passage du milieu est un film français martiniquais, réalisé par Guy Deslauriers, en 2001. L’histoire se déroule sur un bateau négrier quittant le Sénégal en direction des Amériques. Des hommes, des femmes et des enfants sont entassés dans les cales. Les spectateurs assistent aux dix-huit semaines de traversée des captifs du point de vue d’un des leurs qui mènera la révolte. Le film montre les suicides, les maladies, les épidémies qui ponctuent la traversée jusqu’à la préparation d’une révolte. Le cadrage se concentre sur les détails, tels les visages, les yeux, le roulis et les bruits environnants pour que le spectateur saisisse la dureté de cette traversée et l’agonie des esclaves.

Vénus Noire d’Abdellatif Kechiche (2010)

Abdellatif Kechiche rend hommage à Saartjie Baartman surnommée la « Vénus hottentote » dans son film Vénus Noire, sortie en 2010. Le spectateur suit le destin tragique d’une femme exhibée pour ses formes généreuses et ses parties intimes. D’abord, bête de foire, puis prostituée dans une maison close, elle meurt très jeune et des parties de son corps deviennent des pièces de musées pour la science. Le film s’inscrit dans un temps long et soutenu pour restituer les terribles conditions de vie de Saartjie Baartman. Les spectacles dans lesquels elle se produit revêtent un caractère malsain et dérangeant, intensifié par la durée de la scène, qui plonge le spectateur à l’intérieur du film. Le long métrage d’Abdellatif Kechiche met en lumière l’existence d’une femme, méconnue du grand public, forcée de s’exhiber. Le film, présenté à la Mostra de Venise, a vivement secoué les spectateurs présents.

Vénus Noire d’Abdellatif Kechiche MK2

12 Years a Slave de Steeve McQueen (2013)

En 2013, Steeve McQueen réalise l’adaptation cinématographique de l’autobiographie Douze ans d’esclavage de Salomon Northup (1853). Le film se déroule dans l'Amérique des années 1840 et retrace l'histoire de Northup, un homme libre afro-américain, enlevé et vendu comme esclave dans une plantation de la Louisiane. Il est interprété par Chiwetel Ejiofor, entouré par Michel Fassbender, dans le rôle d’un esclavagiste et Lupita Nvong’o, qui joue une esclave sexuelle. Le long métrage obtient 12 prix dont celui de l’Oscar du meilleur film en 2014 pour sa reconstitution fidèle et tragique de l’esclavage dans les plantations de cotons. Porté par la musique de Hans Zimmer, le film témoigne du langage des esclavagistes, des maltraitances et des conditions de vie déplorables des esclaves.

12 Years a Slave de Steeve McQueen Bass Films LLC - TF1 DA