Daniel Costelle et Isabelle Clarke : « Pour Apocalypse, nous avons eu accès à 400 heures d’images»

Daniel Costelle et Isabelle Clarke : « Pour Apocalypse, nous avons eu accès à 400 heures d’images»

13 novembre 2018
Séries et TV
Apocalypse la paix impossible
Apocalypse la paix impossible La Caméra Stylo

Les réalisateurs de la série Apocalypse qui, depuis 9 ans, fait revivre en couleurs les grands événements historiques du XXè siècle, proposent dans leur dernier documentaire une plongée dans l’entre-deux-guerres. Ils nous racontent la genèse de ce film désormais disponible en replay et sur support physique.


On a l’impression de découvrir le monde de l’entre-deux-guerres avec les images, souvent inédites, que vous montrez dans votre documentaire Apocalypse : la paix impossible, 1918 -1926. Comment dénichez-vous ces archives ?

Isabelle Clarke : Tout d’abord, on se donne les moyens - on nous donne les moyens - de visionner énormément  d’archives. Habituellement, pour une heure de documentaire, on recherche 100 heures d’archives. Pour Apocalypse : la paix impossible, dont la durée est de 90 minutes, nous avons eu accès à 400 heures d’images de 80 sources différentes.

Daniel Costelle : Le succès d’Apocalypse joue en notre faveur. De plus, nos documentalistes restent plus longtemps dans les cinémathèques pour prendre le temps de trouver des images. Si vous restez 3 jours à la cinémathèque de Washington, vous recueillerez les mêmes images que tout le monde, mais si vous restez trois semaines, vous êtes sûr de ressortir avec de l’inédit. Dans toutes les cinémathèques, il y a des documents qui ne sont pas exploités parce qu’ils ne sont pas toujours indexés. Et finalement, c’est ainsi qu’on enrichit le patrimoine historique français.

Isabelle Clarke : On croise aussi nos sources. Pour La paix impossible, on a parfois jusqu’à trois sources différentes pour monter une séquence. Il était important pour nous de porter un regard international sur cette période. On aime aussi dénicher des images « amateur » dans des fonds privés, chez les collectionneurs, qui permettent d’incarner l’Histoire. Et enfin, pour se mettre à la hauteur des exigences de la télé qui est passée du 4/3 au 16/9e, nous avons dû retrouver les originaux. C’est comme ça qu’on a déniché des perles : des bobines jamais numérisées. Ce sont tous ces efforts-là qui donnent un sentiment d’inédit.

Est-ce que l’écriture du documentaire précède la recherche d’archives ou inversement ?

Isabelle Clarke : Ça se fait en plusieurs temps. On a un premier film rêvé qui va nous servir de guide de recherches. Puis, quand les images nous arrivent, un autre film s’impose. On réécrit au moment du montage.

Parlons de la colorisation des images. Comment procédez-vous ?

Daniel Costelle : Nous avons une équipe spéciale d’historiens et d’assistants réalisateurs, dirigée par Camille Levasseur, qui fabrique une bible recensant les couleurs des 1 000 plans du film. Ça fait 1 000 pages !

Isabelle Clarke : Chaque image est renseignée, de la décoration militaire à la tenue de Joséphine Baker, document à l’appui. Nous n’inventons rien. Le film est ensuite validé par les historiens et par la chaîne. Commencent alors six à sept mois de postproduction où François Montpellier, le responsable de la colorisation, dirige un travail presqu’artisanal.

Etait-il facile de mettre en images la « paix impossible » ?

Isabelle Clarke : Il y a de nombreux détails qui en s’ajoutant les uns aux autres rendent la paix impossible. Un exemple frappant est ce document sur les prisonniers allemands faméliques, employés à déminer. Ce qui m’a étonné aussi, c’est de voir tous ces drapeaux sortis. Ils avaient fêté la victoire, mais les peuples les gardent levés au nom du nationalisme pour revendiquer une autonomie. Dans les pays de l’Empire austro-hongrois notamment.

Daniel Costelle : On se trompe de décade quand on place la montée des nationalismes dans les années 1930. C’était dans les années 1920. Le système généreux de Wilson sur le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes détruit de l’intérieur des empires qui jusque-là avaient réuni des peuples différents.

De quelle séquence d’Apocalypse : la paix impossible êtes-vous le plus fier ?

Isabelle Clarke : Je suis très émue par la séquence des orphelins anglais qui sont envoyés au Canada, dans des fermes…

Daniel Costelle : Quasiment déportés…