Quelles sont les activités principales de Metropolitan Films ?
Céline Poinas : Créée en 1978 par David et Samuel Hadida, dirigée aujourd’hui par Victor Hadida, Metropolitan Films est une société française spécialisée dans la distribution de films en salles, en vidéo physique et digitale en France et dans les territoires francophones. Dès ses débuts dans la distribution en salle, elle se distingue par une ligne éditoriale résolument tournée vers le cinéma de genre, avec des titres emblématiques comme Evik Dead de Sam Raimi (1983), Reservoir Dogs (1992) de Quentin Tarantino, Seven (1995) de David Fincher ou encore Cube (1997) de Vincenzo Natali, mais aussi des classiques du cinéma hongkongais comme Le Marin des mers de Chine (1983) de Jackie Chan ou encore À toute épreuve (1995) et The Killer (1995) de John Woo. Metropolitan Films a toujours été un acteur très dynamique dans le secteur vidéo. Dès 1983, ses dirigeants fondent avec Michel Poirier, la société Delta Vidéo, structure emblématique de l’ère de la VHS. Aujourd’hui, nous éditons en vidéo plus de 60 films par an, autant de films récents – sorties salle ou direct-to-video – que des films de catalogue ou de patrimoine restaurés.
Pouvez-vous nous parler de la collection HK Vidéo, label historique de Metropolitan Films, consacré justement au cinéma asiatique ?
HK Vidéo est un label d’édition vidéo créé en 1997 au sein de Metropolitan Films, à l’initiative de Samuel Hadida, Victor Hadida, et du réalisateur Christophe Gans, tous trois passionnés par le cinéma hongkongais. À l’époque, ce genre, pourtant très riche, peine à s’imposer dans les salles françaises. Il a longtemps eu une perception négative en France – et dans le monde. Par exemple, la plupart des films d’arts martiaux – en dehors de ceux d’un auteur star dans les festivals comme King Hu – sont sortis dans des salles de quartier sous des titres fantaisistes et dans des copies doublées, ce qui les a relégués au rang d’œuvres de seconde zone. L’objectif de cette collection a été de montrer ces films, la plupart inédits en France, en version complète et originale sous-titrée, dans des éditions élégantes mettant au contraire en valeur leur caractère précieux.
HK Vidéo a débuté en VHS avec en parallèle une revue trimestrielle afin d’accompagner les nouveaux spectateurs et célébrer cette cinématographie particulière. La collection a ensuite épousé les différentes évolutions technologiques se tournant au début des années 2000 vers le DVD puis le Blu-ray. Aujourd’hui, nous sortons certains titres en UHD. Au fil du temps, le label s’est orienté vers d’autres cinématographies (japonaises, coréennes) et a ralenti son rythme de parution ayant édité la plupart des fleurons du cinéma de l’âge d’or hongkongais. Toutefois, HK Vidéo est en passe de renouer avec le cinéma emblématique de ses débuts avec l’acquisition de 100 titres du catalogue Golden Princess, invisibles depuis vingt ans, ainsi que de nombreux classiques produits par la Golden Harvest. Ces catalogues comptent de nombreux titres mythiques de l'histoire du cinéma de Hong Kong, comme la trilogie Histoire de fantôme chinois (1987) de Ching Siu-tung, en salle en décembre prochain ou encore City on Fire (1987) de Ringo Lam attendu en janvier 2026, ainsi que les œuvres majeures de John Woo.

De manière générale, quelle place accordez-vous au cinéma de patrimoine ?
Aujourd’hui, même si nous ne sommes pas perçus comme des éditeurs spécialisés dans le patrimoine, les films de catalogue représentent près de la moitié de notre activité éditoriale. Nous accordons aux œuvres de patrimoine autant de travail et d’attention qu’aux « nouveautés ». En outre, ces classiques suscitent un grand intérêt auprès du public. Il s’agit souvent de sorties vidéo très attendues. L’un des enjeux majeurs de notre mission consiste justement à redonner de la visibilité à des films restés dans l’ombre pendant des décennies. À titre d’exemple, À toute épreuve (1992) de John Woo, sélectionné à Cannes Classics cette année, a suscité un tel engouement que nous avons décidé de le ressortir à l’écran le 27 août dernier, et nous allons l’éditer en 4K et Blu-ray en décembre prochain avec des bonus inédits. Parmi lesquels : une interview de John Woo et de plusieurs de ses collaborateurs, un module de 52 minutes dans lequel l’équipe originelle du label HK Vidéo et de la revue (Christophe Gans, David Martinez, Léonard Haddad, Julien Carbon) vont échanger autour du film, de son origine à son influence sur le cinéma d’action. À toute épreuve est d’ailleurs présenté au Festival Lumière, qui se tient jusqu’au 19 octobre à Lyon, aux côtés de The Killer (1989) et Une balle dans la tête (1990), deux autres œuvres du réalisateur.
Quels défis rencontrez-vous dans l’édition vidéo des œuvres anciennes ou rares ?
L’édition vidéo est un secteur très spécifique, en particulier pour le cinéma de patrimoine. Bien que notre ambition soit de publier les films dans la plus belle édition possible, nous devons composer avec les réalités du marché. C’est aussi un travail de fourmi de pouvoir les accompagner au mieux entre la recherche et la récupération des éléments des films, l’acquisition ou la restauration d’un master en 4K, l’accompagnement éditorial, de retrouver comme pour Le Dernier Empereur de Bertolucci des images inédites de tournage, de proposer des documents d’époque, les nouvelles qui ont inspiré tel film, des interviews, des éclairages… Le soutien du CNC est précieux dans cette activité, en particulier à travers l’aide sélective à l’édition vidéo.

Metropolitan Films présente plusieurs œuvres au Festival Lumière. Quelles sont-elles ?
D’abord Amours chiennes (2000) d’Alejandro González Iñárritu montré dans la catégorie « Grands films sur grand écran », lequel a eu une projection extraordinaire à Cannes Classics cette année en la présence du réalisateur et de l’acteur principal. En complément de la présentation du film à Lumière, et à l’occasion de son 25e anniversaire, Metropolitan Films a prévu de le ressortir en salle le 29 octobre et de proposer immédiatement son édition vidéo en Blu-ray 4K, un format inédit pour cette œuvre, le 14 novembre. Ensuite, trois œuvres majeures de John Woo que j’évoquais plus haut : The Killer (1989), Une balle dans la tête (1990) et À toute épreuve (1992) projetées à l’occasion d’un cycle hommage dédié au cinéaste, lui aussi présent à Lumière. Ces films vont ressortir en salles sous notre bannière – The Killer, le 26 novembre et Une balle dans la tête en février prochain – accompagnés de leurs éditions vidéo en Blu-ray 4K en 2026. Le festival Lumière marque la consécration de notre travail de longue date aux côtés de John Woo dont nous avons la chance d’avoir distribué également nombre de ses autres films, notamment Les 3 Royaumes, ou encore plus récemment édité Silent Night.
Quels sont les projets de Metropolitan Films à l’avenir ?
Nous allons continuer nos ressorties sous le label HK Vidéo dont Le Marin des mers de Chine de Jackie Chan ou Il était une fois en Chine de Tsui Hark. Nous prévoyons aussi dans les prochains mois la réédition de Furyo de Nagisa Oshima. Au programme également, Une nuit de réflexion (1986) de Nicolas Roeg, ou encore Freeway (1997) de Matthew Bright, avec Reese Whitherspoon, produit par Samuel Hadida.