Festival du Film Francophone d’Angoulême : 3 questions à Marie-France Brière

Festival du Film Francophone d’Angoulême : 3 questions à Marie-France Brière

19 août 2018
Cinéma
Festival du Film Francophone d’Angoulême 2018
Festival du Film Francophone d’Angoulême 2018 DR

Des spectateurs de plus en plus nombreux, des infrastructures hôtelières insuffisantes, un niveau de sécurité en hausse… : les défis à relever sont nombreux pour les prochains Festivals du Film Francophone d’Angoulême dont la 11è édition se déroule du 21 au 26 août 2018. Marie-France Brière, l’une des créatrices de l’événement avec Patrick Mardikian et Dominique Besnehard, répond au CNC à 3 questions sur les défis du festival.


Le Festival du Film Francophone d’Angoulême a accueilli près de 39 000 visiteurs en 2017. C’est un défi d’accueillir autant de festivaliers ?

Marie-France Brière : Le gros défi, c’est qu’Angoulême est une ville où il n’y a pas d’hôtels. Il n’y a pas d’infrastructure et peu de cinémas. Grâce au CGR, nous avons 11 salles, plus 4 autres salles pour la compétition. Cette année, on s’est mis en tête de réhabiliter un vieux cinéma des années 50, L’Epron. A l’époque, c’était ‘The Place to be’ : un cinéma chic qui faisait des premières parisiennes. C’est devenu un studio de danse. Une dame l’a racheté mais n’a absolument pas les moyens de l’entretenir. La salle a donc fermé en 1995 et est restée telle quelle. On est en train de se ruiner pour la remettre en état. C’est un défi financier. CGR nous fournit les fauteuils, un magasin de bricolage d’Angoulême nous donne la moquette, la mairie a rétabli l’électricité : on a fait une chaîne de solidarité. C’est de la folie, c’est juste pour de l’art. Mais ça va être une salle de plus pour la compétition. Il nous manquait à peu près 250 places pour les festivaliers qu’on était obligés de refuser.

En termes d’infrastructures hôtelières, est-ce qu’il y a des discussions avec la municipalité pour augmenter les capacités ?

Pas du tout même si on a essayé. On avait repéré un vieux cloître qui a été acheté par un promoteur de Bordeaux. On lui a demandé de faire un hôtel et il en a fait autre chose. Nous, malheureusement, nous ne pouvons pas. Il y a déjà le cinéma… Il y a trois ans, des jeunes sont venus nous voir en disant : « On a racheté un cloître, on va en faire un hôtel ».  Je suis allée sur le chantier et j’ai dit : « Je prends toutes les chambres ». C’est l’hôtel où loge le jury maintenant. Mais il n’y a que 14 chambres. Il faudrait 5 ou 6 hôtels comme ça. J’ai repéré qu’un groupe faisait des hôtels éphémères. Mais c’est beaucoup trop cher pour cette année car on avait déjà le cinéma. Peut-être après… Il est évident que si un promoteur voulait faire un hôtel, on lui donne un pass à vie !


La subvention de la région n’a que peu évolué en 10 ans.
Est-ce un problème financièrement parlant ?

Depuis qu’il y a la grande région et qu’Alain Rousset est président, il est revenu vers nous. Depuis deux ans, on a récupéré notre dû. Mais Ségolène Royal nous a abandonnés pendant 8 ans. C’était très difficile. On a eu beaucoup de partenaires privés, c’est aussi pour ça que le festival tient. Dominique et moi, nous sommes allés arracher les sponsors avec les dents. Comme on voulait farouchement garder notre indépendance, nous n’avons pas sollicité les producteurs, ni les grands groupes. Le CNC nous a beaucoup aidés, tout comme certaines grosses marques privées. Sur la sécurité, on a doublé notre budget. La première fois, ça m’avait affolée, je ne voulais pas voir des soldats en uniforme. Mais tout le monde est discret et c’est une ville de garnison donc ils sont plus habitués que nous. Ça a augmenté le budget de sécurité de 50%, ce qui a une incidence sur l’enveloppe globale. Mais on ne retire jamais rien. J’ai une devise : « Quand on te donne, prend. Quand on te prend, créé ». On ne fera jamais d’économie sur la qualité. Si nous ne sommes pas capables d’aller chercher l’argent, c’est qu’il faut arrêter. Ce sera un signe que nous ne sommes plus capables.
 

Netflix pourrait-il présenter un long métrage au Festival du Film Francophone d’Angoulême ?

Marie-France Brière : « Autant je ne peux pas dire ce qui arrivera du point de vue « hôtels » dans les dix ans à venir. Mais là, je pense que le problème va se poser un jour. Je ne serais pas pour si ça gêne qui que ce soit nous ayant aidés depuis le début. Mais je pense que tout le monde va évoluer sur ce sujet-là. C’est inexorable. »