Le festival d’Annecy 2019 commenté par son directeur artistique

Le festival d’Annecy 2019 commenté par son directeur artistique

11 juin 2019
Cinéma
Affiche du Festival d'Annecy 2019
Affiche du Festival d'Annecy 2019 DR
Alors que le festival d’Annecy vient d’ouvrir ses portes, Marcel Jean, son directeur artistique, commente pour nous les temps forts de cette nouvelle édition. Demandez le programme.

La vitalité française

« Je crois que cette année marque un véritable pic de créativité française. On est à un sommet de la production hexagonale, à tel point qu’on a été obligé de refuser en sélection de très grands films pourtant prêts à temps. C’est la première fois qu’il y a autant d’excellence tricolore en sélection par exemple : regardez Les Hirondelles de Kaboul ou le beau J’ai perdu mon corps de Jérémy Clapin - un habitué du festival… la quantité, la qualité et la diversité des films soumis cette année est magnifique et elle prouve que la France est bien une terre d’accueil de talents. »

Un hommage au Japon

« En 1999, Annecy avait organisé un hommage au Japon. Mais depuis, la connaissance de l’animé a considérablement évolué. En 99 on découvrait à peine cette cinématographie… La popularité des films Ghibli et celle d’Hosoda (qui était là l’année dernière) ont beaucoup fait pour la reconnaissance de cette tradition artistique. 20 ans plus tard, on a voulu parier sur ce qui arrive, ne pas regarder dans le rétro, mais se concentrer sur l’avenir de l’animation japonaise, tracer des lignes pour le futur. Comme pour la France, nous sommes face, là aussi, à un cycle de production totalement inédit. Il y a l’émergence de jeunes indépendants, des pratiques et des formes de production nouvelles… C’est tout cela que nous voulions explorer au cœur des conférences et des films proposés. On aurait pu penser que la mort de Takahata et la retraite de Miyazaki auraient stérilisé l’industrie. C’est le contraire qui s’est produit : il y a une variété de sujets, de supports et d’ambitions artistiques très étonnantes. Plus que chez aucune autre cinématographie mondiale. Si je devais retenir une preuve de ce bouillonnement je dirais qu’il faut voir le long métrage omnibus, Modest Heroes, qui montre cette diversité et cette virtuosité renouvelée. »

Des sujets audacieux

« Après avoir signé Miss Hokusai, une relecture féministe de l’histoire du peintre japonais, Keiichi Hara revient avec un film plus familial, mais qui traite d’un sujet dans l’air du temps. The Wonderland est une fable écologique entre deux mondes parallèles, à la facture graphique époustouflante. De son côté Masaaki Yuasa, lauréat d’un Cristal en 2017 pour Lou et l’île aux sirènes, raconte dans Ride Your Wave le travail de deuil d’un personnage déboussolé. On pourra également découvrir le quotidien de deux couples afghans dans Les Hirondelles de Kaboul ou le retour en Espagne franquiste de Buñuel, dans Buñuel après l’âge d’or. Les animateurs n’ont aucun tabou et aucune limite… c’est le propre de cet art. »

La VR

« Cela fait quelques années que le festival suit la VR, mais cette année on a ouvert une compétition entièrement dédiée à cette technologie. Face à la croissance de la production et à l’augmentation de la qualité des projets, à leur originalité et à leur diversité, on a senti qu’il fallait prendre en compte ce bouleversement. Là encore, la qualité des projets est faramineuse. Prenez Gymnasia, réalisé en stop motion : le film utilise le potentiel des marionnettes de manière très créative ! D’un autre côté il y a Ayahuasca de Jan Kounen, qui propose une expérience immersive très intéressante. La question qu’on peut se poser aujourd’hui c’est : est-ce que cette vitalité exceptionnelle va se maintenir dans la durée ? S’il n’y a toujours pas de modèle économique, c’est un support en explosion. »