« Nevada », la singulière aventure américaine de Laure de Clermont-Tonnerre

« Nevada », la singulière aventure américaine de Laure de Clermont-Tonnerre

20 juin 2019
Cinéma
Nevada
Nevada Ad Vitam - Légende Films - DR

C’est aux Etats-Unis que cette réalisatrice française a fait ses premiers pas dans le long métrage, adoubée par Robert Redford. Elle revient sur cette expérience singulière.


Nevada parle de la thérapie par les animaux pratiquée en prison. Vous avez eu l’idée de ce sujet en lisant un article sur une femme pratiquant cette méthode près de Strasbourg. Pourquoi avoir choisi de transposer cette histoire aux Etats-Unis ?

J’ai vécu à New York quand j’avais 22 ans. J’ai adoré cette ville où j’ai noué des amitiés très fortes. Et j’y ai d’ailleurs tourné en 2013 mon premier court métrage, Atlantic Avenue. Puis, en effet, c’est en France que j’ai entendu parler de cette thérapie par les animaux en prison. Cela m’a d’abord inspiré un court métrage, Rabbit, que j’ai cependant eu envie de tourner à New York, dans la prison de Rikers Island, pour retrouver l’équipe américaine avec qui je m’étais si bien entendue. Puis, lors de mes recherches, j’ai fait la connaissance de Kathleen O’Meara qui dirige le département psychologie-psychiatrie des prisons californiennes. C’est elle qui m’a parlé de la thérapie par les chevaux effectuée dans cette prison du Nevada où j’ai tourné, car elle m’en a ouvert les portes avant de devenir notre consultante.

Au moment où vous vous lancez dans ce projet, vous n’avez aucun producteur, ni français ni américain. Comment les avez-vous dénichés ?

Rabbit ayant été sélectionné au festival de Sundance, j’ai postulé pour intégrer leur screenwriters lab où ils choisissent chaque année douze projets parmi des candidats du monde entier. J’ai eu la chance d’être retenue. Pendant cinq jours, j’ai enchaîné des exercices théoriques dispensés par Joan Tewkesbury, la scénariste de Nashville de Robert Altman et des échanges pratiques sur mon scénario avec divers intervenants. Puis, des mois plus tard, j’ai aussi intégré leur directors lab. Là, pendant un mois, on tourne chacun cinq scènes de notre scénario en nous adjoignant des acteurs, des techniciens et des réalisateurs (James Mangold, Ed Harris…) pour qu’ils nous nourrissent de leur expérience. Le résultat final est toujours scruté de près par des investisseurs. C’est là que les Français de Légende (La Môme) et les Américains de Focus (Brokeback Mountain) sont venus me proposer de produire Nevada.

Au générique de votre film, on trouve Robert Redford comme producteur exécutif. C’est à Sundance, dont il est le créateur, que vous l’avez rencontré ?

Oui, il était présent le jour de mon arrivée au screenwriters lab. Et il m’avait confié en aparté que mon projet lui parlait tout particulièrement car il était familier de ce programme de réhabilitation par les mustangs. Puis, il m’a soutenue lors du directors lab pour une de mes demandes bien précises : je voulais tourner une de mes cinq scènes avec des chevaux pour m’y confronter. Or les responsables du programme refusaient pour des questions d’assurance. Redford a non seulement appuyé ma demande mais quand elle a été acceptée, il m’a aussi ouvert les portes de son ranch et prêté ses chevaux pour la filmer. Un moment que je n’oublierai jamais ! Et c’est à la fin du directors lab qu’il a proposé de devenir le producteur exécutif de Nevada.

En quoi a consisté précisément son rôle ?

Il est intervenu à des moments très précis, quand son aide était essentielle. D’abord le jour où Susan Sarandon a dû quitter le projet pour des questions d’emploi du temps. C’est lui qui a appelé Connie Britton (Friday Night Lights) pour lui suggérer de reprendre le rôle. Ce qu’elle a accepté quasi instantanément. Mais sa voix a surtout compté au moment du montage quand sur certains points précis, Focus et moi n’étions pas d’accord. Comme il approuvait mes choix, il lui a suffi de passer un coup fil où il expliquait qu’il aimait beaucoup le montage en l’état pour que cela règle la question. Il n’a jamais besoin d’insister. Sa voix porte instantanément. Et j’ai eu la chance que nous soyons sur la même longueur d’ondes.

Nevada de Laure de Clermont-Tonnerre, en salles le 19 juin, a bénéficié de l’aide à l’édition vidéo du CNC.