Quand l'univers de la mode rencontre le cinéma

Quand l'univers de la mode rencontre le cinéma

26 juin 2020
Cinéma
Falbalas
Falbalas Essor Cinematographique français - DR - TCD
Falbalas sortait sur les écrans français  en juin 1945. Pour saluer les 75 ans de ce classique de Jacques Becker, grand mélodrame autour des tourments de cœur d'un couturier parisien, petit tour d'horizon des films français qui ont déployé sur pellicule l'univers de la mode.

Falbalas (Jacques Becker, 1945)

Une jeune provinciale (Micheline Presle) arrive à Paris pour préparer son mariage mais elle tombe amoureuse du meilleur ami de son futur mari, un couturier (Raymond Rouleau) fantasque et séducteur... Tourné pendant l'Occupation, Falbalas se situe dans un Paris hors du temps, mais le réalisateur de Goupi Mains rouges et des futurs Casque d'or et Le Trou décrit le milieu de la mode avec réalisme et sensibilité. Le film, dont les costumes sont de Marcel Rochas, a fait une forte impression sur un certain Jean-Paul Gaultier. La légende veut que sa vision l'ait décidé à devenir couturier.

Le Couturier de ces dames (Jean Boyer, 1956)

En 1954, Fernandel - alors au sommet de sa gloire comique - tournait la comédie Coiffeur pour dames devant la caméra de Jean Boyer. Quatre ans plus tard, les deux compères (qui firent, au total, dix films ensemble entre 1941 et 1964) se réunirent pour en faire une version « mode » avec Le Couturier de ces dames (dont les costumes sont signés Pierre Cardin), où il joue un modeste « coupeur » qui aspire à devenir un grand couturier grâce à un héritage... C'est un prétexte pour donner à Fernandel l'occasion de faire son numéro. Mais selon l'historien Jean Tulard, face à lui, « Suzy Delair n'est pas loin de lui voler la vedette ». Les temps changent...

Qui êtes-vous, Polly Maggoo ? (William Klein, 1966)

Ce faux documentaire satirique consacré à la romance entre un mannequin célèbre et le prince d'un petit royaume rassemble Jean Rochefort, Alice Sapritch, Philippe Noiret ou encore Delphine Seyrig et raconte, à la façon d'un grand « happening » artistique, les tourments de la mode et du pop art dans les «  sixties  ». Qui êtes-vous, Polly Maggoo ? est justement l'un des grands films des années 60, un film-somme qui fait tourbillonner des influences Nouvelle Vague au son d'une musique de Michel Legrand.

Frankie (Fabienne Berthaud, 2005)

Diane Kruger joue Frankie, une mannequin détruite par la drogue qui devient SDF et tente de se reconstruire. Pour son premier long métrage, la réalisatrice Fabienne Berthaud (qui a initié Cécile de France au chamanisme dans Un monde plus grand l'an dernier) ne choisit pas la facilité et montre les dessous peu reluisants d’une partie du monde de la mode qui élève, détruit et abandonne les êtres qui s'y risquent.

Lagerfeld Confidentiel (Rodolphe Marconi, 2007)

Tourné pendant trois ans de 2003 à 2006 avec une petite caméra numérique « à partir de cent cinquante heures de rushes », ce documentaire intime tourné par un proche de Karl Lagerfeld (disparu fin 2019) tente de percer les mystères du créateur, qui finit par se mettre en scène lui-même et à garder le contrôle de son image. Quinze ans plus tard, le mystère reste entier, mais le personnage conserve sa fascination.

Coco avant Chanel (Anne Fontaine, 2008) et Coco Chanel & Igor Stravinsky (Jan Kounen, 2009)

Paris à la Belle Epoque  : la jeune Gabrielle (Audrey Tautou) s'arrache à sa condition populaire en devenant la femme d'un riche baron (Benoît Poelvoorde) et l'amante d'un joueur de polo anglais (Alessandro Nivola). Mais surtout, elle va suivre son rêve  : devenir une grande couturière et libérer la mode féminine sous le nom de Coco Chanel. C'est le sujet de Coco avant Chanel, récit classique et soigné, par Anne Fontaine, des années de formation de l'artiste. Quelques mois plus tard sort Coco Chanel & Igor Stravinsky qui explore la romance passionnée entre la couturière (Anna Mouglalis) et le compositeur (Mads Mikkelsen), bien décidés chacun à leur façon à révolutionner les arts auxquels ils se sont consacrés. Le film, réalisé de façon très « immersive » par Jan Kounen, n'est pas du tout un biopic classique mais le récit d'un moment dans la vie des deux artistes autour de la représentation du Sacre du printemps en 1913 qui a fait scandale.

Yves Saint Laurent (Jalil Lespert, 2014) et Saint Laurent (Bertrand Bonello, 2014)

Produits en parallèle et sortis à neuf mois d'intervalle, les deux films ont le même sujet - raconter la vie d'Yves Saint Laurent avec un casting et des moyens luxueux- mais pas du tout la même approche. D'un côté, le biopic classique du couturier, « autorisé » par Pierre Bergé, de sa jeunesse à sa maturité, avec Pierre Niney dans le rôle-titre  ; de l'autre, une vision radicale, « arty », de la période sombre d'YSL dans les années 70, et une réflexion sur la création mettant la mode au même niveau que la peinture ou la musique.

Personal Shopper (Olivier Assayas, 2016)

Le milieu de la mode ne se résume pas à des créateurs et des mannequins  : Olivier Assayas nous fait découvrir le métier de « personal shopper », une personne qui achète des vêtements (généralement très chers) pour une autre (généralement très riche). Sauf que Maureen (Kristen Stewart), la «  personal shopper  » du titre, est une médium hantée par le fantôme de son frère jumeau et reçoit de mystérieux SMS... Un film fantastique original, qui plonge dans un Paris glacial fait d'enseignes de luxe vides et qui parle d'identité contemporaine à l'ère des réseaux sociaux et du paraître. Prix de la mise en scène au Festival de Cannes 2016.

Papicha (Mounia Meddour, 2019)

A Alger dans les années 90, l'intégrisme monte et Nedjma (Lyna Khoudri), étudiante en stylisme qui vend ses créations en boîte de nuit à des jeunes femmes (les « papichas »), va se heurter à la violence des nouveaux hommes prêts à prendre le pouvoir. La mode féminine n'est pas que l'objectif de l'héroïne  : c'est le moyen de Papicha de dénoncer les diktats politiques qui pèsent sur le corps et le travail de la femme. Les César lui ont décerné deux trophées, celui du Meilleur premier film et du Meilleur espoir féminin.