Comment concilier création de jeux vidéo et télétravail ?

Comment concilier création de jeux vidéo et télétravail ?

14 mai 2020
Jeu vidéo
SUP Multiplayer Racing
SUP Multiplayer Racing Oh BiBi
Depuis le 16 mars dernier, le télétravail est la norme dans de nombreuses entreprises voulant poursuivre leur activité pendant le confinement. Si le déconfinement a commencé le 11 mai, la situation sanitaire est telle que le travail à distance reste conseillé par les autorités pour limiter les déplacements. Mais comment imaginer et créer des jeux vidéo lorsqu’on doit travailler en équipe mais chacun chez soi ? A la tête du studio parisien de jeux mobiles Oh Bibi qu’il a cofondé, Martial Valéry revient pour le CNC sur l’organisation mise en place pendant cette période.

En termes de création, quelle était la situation dans votre société lorsque le confinement a été mis en place ?

Nous avons relativement eu de la chance car tout ce que nous devions lancer l’a été avant le confinement. Il aurait été difficile de mettre au point un nouveau projet pendant cette période difficile du fait de la distance : créer un nouveau jeu demande une coordination d’équipe plus importante pour la créativité.

Comment l’équipe s’est-elle adaptée au télétravail généralisé ?

Avec les grèves précédentes et notre politique flexible de télétravail à l’année, nous étions préparés à généraliser cette pratique. Il n’y a eu aucun problème technique empêchant sa mise en place. Nous avions également anticipé de quelques heures le confinement : nous avions ainsi annoncé, avant même la décision du gouvernement, la mise en place du télétravail dès le lundi 16 mars, ce qui a permis de ne pas être pris au dépourvu. Au quotidien, nous utilisons désormais les outils de communication tels que Slack (« une plateforme collaborative qui permet de remplacer les e-mails et de faciliter les échanges entre les membres de votre équipe », précise le site de cet outil ndlr) et Letsrelo (une application permettant notamment d’accéder à distance à ses données locales ndlr). Des outils que nous utilisions avant. Notre culture d’entreprise a toujours beaucoup insisté sur l’autonomie et la responsabilité de nos collaborateurs, en qui nous avons confiance. Ce management a donc permis de pouvoir rapidement mettre en place le télétravail : les choses se sont faites assez naturellement et notre productivité n’a pas été impactée. L’engagement de nos collaborateurs est resté aussi fort, voire même davantage qu’avant le confinement.

Quels changements avez-vous instaurés ?

L’enjeu de notre côté a été de davantage communiquer avec l’équipe dans cette période où nous n’allions pas nous voir. Ce qui a permis de transmettre des informations qui circulaient peut-être de manière moins efficace en temps normal. Ces périodes de crise sont des tests : on peut soit réussir, soit échouer. Nous avons essayé de gérer cette transition au mieux et de prendre en compte l’état de santé physique et psychologique de nos collaborateurs. Nous avons effectué un recentrage autour du bien-être de tout le monde. La direction a appelé chaque personne au moins une fois pour en discuter et a rappelé ceux qui allaient moins bien. Nous avons également programmé au moins une fois par semaine un point d’équipe avec l’ensemble des employés pour transmettre les dernières recommandations sur l’organisation et faire un point sur les projets en cours et les performances des jeux. Nous avons fait en sorte que les équipes maintiennent une réunion quotidienne le matin avant de démarrer la journée. Enfin, nous avons privilégié la communication orale plutôt qu’écrite : nous avons encouragé nos collaborateurs à s’appeler plutôt que se parler par mail ou tchat. C’est une manière de ne pas perdre les informations et de garder un lien entre collègues.

Vos bureaux sont situés en plein cœur de Paris. Si les consignes de télétravail perdurent dans le temps, comment vous organiserez-vous pour lancer de nouveaux projets et brainstormer à distance ? D’autant plus que, comme vous le souligniez dans l’interview que vous nous avez accordée en 2019, vous faites en sorte à Oh BiBi que « la partie créative soit la plus ventilée possible » ?

Nous avions lancé beaucoup de projets avant le confinement et à court terme, nous n’avons pas prévu de mettre en route d’autres jeux : nous n’avons donc pas encore complètement réfléchi à l’organisation pour poursuivre en télétravail. Mais on va effectivement devoir l’envisager. Aujourd’hui, nous avons quand même les outils technologiques permettant d’améliorer le travail à distance. Mais sans le contact humain et l’émulation qui se crée en discutant ensemble dans une même pièce, ça peut être difficile pour la suite. Il n’y a pas de garantie que sur des aspects plus créatifs, le télétravail soit aussi efficace. Il faudra surmonter ça.

Quelles solutions envisagez-vous pour la suite ?

Nos locaux ont déjà partiellement rouvert pour les salariés qui étaient en souffrance chez eux parce qu’ils vivaient seuls ou dans un petit logement. Nous leur laissons donc la possibilité de revenir s’ils le souhaitent. Pour la suite, nous pourrions imaginer des mini-réunions avec un nombre de personnes limité. Nous nous sommes d’ailleurs assurés qu’il y ait du gel et des masques à disposition ainsi que 4 mètres minimum entre chaque poste : l’open space peut accueillir normalement jusqu’à 55 collaborateurs, actuellement, sa capacité maximale est de 10 personnes afin de respecter les consignes données par le ministère du Travail. Notre priorité reste la sécurité de nos employés tant que le virus circule : le travail à distance doit donc rester la norme. Nous préférons subir les impacts possibles de l’organisation à distance que faire peser un risque sanitaire sur notre équipe. Nous avons aussi la chance d’être dans une industrie qui résiste assez bien à cette crise. Pour le moment, Oh BiBi n’a pas été impacté négativement par cette crise. Nous continuons les mises à jour sur notre nouveau jeu, nous avons d’autres créations en production sur lesquelles on continuera à travailler pour les sortir prochainement – nous l’espérons –, coronavirus ou pas. Même si la situation n’est pas idéale, notre but est de maintenir l’activité.