« Cheyenne et Lola », un « Thelma et Louise » venu du Nord

« Cheyenne et Lola », un « Thelma et Louise » venu du Nord

29 avril 2020
Séries et TV
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Cheyenne et Lola
Cheyenne et Lola Lincoln TV - OCS
La créatrice Virginie Brac nous fait découvrir la série OCS Cheyenne et Lola qui puise ses références dans le film de Ridley Scott.

Scénariste de Paris ou encore Insoupçonnable, Virginie Brac signe pour OCS une nouvelle série originale intitulée Cheyenne et Lola. Ce thriller se déroule le long des plages du Nord, avec la crise des migrants en arrière-plan, et suit le parcours tumultueux de deux femmes qui n'auraient jamais dû se rencontrer. Sortie de prison depuis six mois, Cheyenne (Veerle Baetens) fait des ménages sur les ferries en rêvant de partir en Amazonie. Lola (Charlotte Le Bon) est une Parisienne égoïste et sans scrupules, qui vient de débarquer dans le Nord pour s'installer avec son amant. Quand elle tue l'épouse de ce dernier sous les yeux de Cheyenne, témoin involontaire du crime, les deux femmes vont devoir s'entraider pour faire disparaître le corps.

Un western moderne

Au départ de Cheyenne et Lola, il y a le livre Le Quai de Ouistreham de Florence Aubenas qui a inspiré la scénariste : « C'est un documentaire, très fort. Il a été adapté au cinéma par Emmanuel Carrère (le film n’est pas encore sorti NDLR) et c'est ce qui m'a donné l'idée de l'arène - le décor de la série - avec en toile de fond le trafic de migrants. Cet aspect-là n'apparaît pas dans le livre de Florence Aubenas... ». Le résultat est effectivement un étonnant western moderne qui suit le parcours de deux femmes que tout oppose, « en bordure des plages du Nord, du côté de Dunkerque. L'héroïne vit dans une caravane, dans un camping. C'est un microcosme avec des gens défavorisés qui n'ont pas beaucoup de contacts avec l'extérieur. C'est un petit monde. Pour moi, ça se rapproche de Breaking Bad qui peut être vu comme un western à Albuquerque. »

Virginie Brac avait envie de parler d'une amitié entre deux femmes. Un peu comme Thelma et Louise, la folle équipée de Geena Davis et Susan Sarandon en 1991. « Deux femmes qui n'auraient jamais dû se rencontrer, qui traversent une somme de problèmes et qui vont finir par s'épauler et s'entraider. Lola est une bimbo. Quand la série commence, on ne l'imagine pas capable de tuer quelqu’un. Face à elle, Cheyenne est beaucoup plus dure et a tous les codes pour résoudre la situation. La différence avec le film de Ridley Scott, c’est qu’il s'agit d'une success story, explique Virginie Brac. Mais c’est vrai que Cheyenne et Lola sont des Thelma et Louise en puissance. D’abord parce qu'elles se mettent en marge. Elles finissent par sombrer dans l’illégalité pour s'en sortir. Mais ce qui rapproche la série du film de Ridley Scott, à mon sens, c’est qu’elle raconte d’abord l'histoire d'une amitié. Cela dit, notre histoire n'est pas une cavale. Elles sont dans une situation où elles ne peuvent pas s'enfuir. Elles vont au contraire décider de ne pas fuir et de ramasser autant d'argent que possible. »

Un casting idéal

La série d'OCS est donc d'abord, et avant tout, une histoire de femmes. Fortes, peut-on ajouter. « Fortes parce qu'elles sont au centre de l'histoire. Ce sont des personnages qui luttent pour s'en sortir. Pour réussir. Pour une vie meilleure. » Et pour les incarner, Virginie Brac a réuni un duo composé de Veerle Baetens (Alabama Monroe) et Charlotte Le Bon (L'écume des jours). « Je cherchais une opposition. Mais ces deux comédiennes ont apporté des nuances incroyables à leurs personnages. Ce sont des actrices formidables, je ne pouvais pas rêver que mes personnages soient interprétés plus brillamment, plus subtilement. Elles se sont prises de passion pour leurs rôles. Elles les ont incarnés en y mettant leurs fragilités, leurs forces, leurs points de discorde... »

Les deux actrices portent ainsi cette série dramatique qui prend un soin tout particulier à ne jamais virer au sinistre. « Par certains côtés, la série est drôle. Il y a des situations du quotidien qui sont triviales, voire baroques. On parle de la crise migratoire, de cette détresse humaine, de la misère. C'est un sujet en arrière-plan, mais la série n'est pas centrée sur ça. On a fait très attention à ne pas faire du Ken Loach ! C’est un cinéaste que j’admire énormément, mais je cherchais une dynamique différente, plus joyeuse, plus explosive. »

Une sensibilité flamande

Même si elle a été filmée en Normandie, Cheyenne et Lola joue la carte du Nord de la France et revendique même une sensibilité flamande. « Le décor est très important. L'immensité de la mer. Ces grandes plages. Ce côté perdu. L'omniprésence des migrants qu'on voit peu mais qu'on devine toujours, qui sont là, et qui sont, en fait, les seules personnes « en-dessous » de Cheyenne et Lola, socialement parlant... Ce n'était pas volontaire au départ. C'est venu du réalisateur, Eshref Reybrouck, flamand, qui s'est pris de passion pour la série et a tenu à diriger lui-même les huit épisodes. Il est venu avec un chef opérateur flamand qui a capté de superbes plans et de très belles lumières. Evidemment, les nuances de l’actrice flamande Veerle Baetens y sont également pour beaucoup... ».

Prévue pour être projetée en avant-première à Séries Mania avant son lancement sur OCS, la série Cheyenne et Lola a finalement été reportée en raison de la crise sanitaire. « C'est une situation extrêmement étrange », confie Virginie Brac, la créatrice. « Elle ne sortira pas avant novembre maintenant. On s’était dépêchés de finir la série pour le festival Séries Mania et son annulation a été un vrai coup ! »