Adrià Garcia: « Raconter la réalité à travers la magie et la poésie des enfants »

Adrià Garcia: « Raconter la réalité à travers la magie et la poésie des enfants »

21 août 2019
Cinéma
Ma famille et le loup
Ma famille et le loup Folivari - Nectarious Films - La compagnie cinématographique - Panache Productions

Après Nocturna,  film d’animation qui dévoilait les mystères de la nuit, Adrià Garcia s’intéresse au deuil dans Ma famille et le loup. Le cinéaste espagnol, qui fut le directeur artistique de Juan Antonio Bayona sur Quelques minutes après minuit, raconte sa façon d’utiliser le prisme de l’enfance pour mieux mêler cauchemars et réalité.


Votre premier film, Nocturna, entièrement animé, racontait les terreurs nocturnes de l’enfance. Et la mort se situe au cœur de votre deuxième long métrage, Ma famille et le loup. Qu’est-ce qui vous inspire tant dans nos peurs primales ?

Adrià Garcia: Pour moi, ce sont avant tout des thèmes universels dans lesquels tout le monde peut spontanément se projeter et avec lesquels je vais pouvoir jouer par le biais de métaphores. Chacun va donc avoir sa propre lecture de Nocturna et de Ma famille et le loup en fonction de son rapport personnel à la peur du noir et de la mort. Mais si ces thématiques sont effectivement liées, je n’ai pas pour autant envisagé ces deux films comme un diptyque. Ce sont juste deux sujets qui m’intéressent et stimulent mon imagination.

Près de douze ans séparent vos deux longs métrages. Quand et comment est née l’idée de Ma famille et le loup ?

J’ai commencé à chercher l’idée d’un nouveau long métrage dès la fin de Nocturna en ayant envie d’une veine plus naturaliste. J’ai assez vite eu en tête l’image d’une famille, un soir d’été en bord de mer, avec une grand-mère entourée d’une ribambelle d’enfants. Je savais que ça allait me permettre de mêler l’imagination galopante de ces derniers à la réalité d’un drame à venir. Comme je pensais réaliser Ma famille et le loup en animation, j’ai commencé à travailler sur la métaphore de la mort à travers le personnage de loup : la grand-mère, malade, raconte aux enfants qu’il va venir la chercher.

Pourquoi avoir changé vos plans et tourné Ma famille et le loup principalement en prises de vue réelles ?

Réunir le financement d’un film est toujours difficile et encore plus lorsqu’il s’agit d’animation. Une fois la première version du scénario terminée et plusieurs planches dessinées, nous sommes partis avec ma productrice Christine Ponzevera (Nectarious Films) à la recherche de partenaires. La rencontre avec le producteur Didier Brunner de Folivari (Les Triplettes de Belleville) a été décisive. Il aimait le scénario mais ne l’imaginait pas en film d’animation. C’est lui qui nous a suggéré de le tourner en prises de vue réelles. Honnêtement, je suis resté un peu interdit sur le moment. Mais j’ai vite compris qu’en mêlant quelques séquences animées autour du personnage du loup à des prises de vue réelles, j’allais pouvoir mieux développer ce mélange que je recherchais entre la vie envisagée d’un point de vue adulte et l’imagination infinie de l’enfance. Le film a changé de forme, mais il n’a jamais perdu son ADN.

Vos œuvres ont cette ambition et cette force de parler aussi bien à des enfants qu’à des adultes. C’est une donnée essentielle pour vous au moment de leur écriture et de leur fabrication ?

Je ne réfléchis jamais en termes de public. C’est le récit, et le récit seulement, qui me guide. J’essaie de raconter en images une histoire comme je la raconterais à un proche, peu importe son âge. Je ne me demande jamais si c’est trop adulte ou trop enfantin. Sauf quand je vois que je bute vraiment sur certaines scènes.

Aviez-vous des films en tête durant toute la conception de Ma famille et le loup ?

J’ai bien évidemment pensé à tous ces films américains d’aventure mettant en scène des enfants, tel que Les Goonies, que j’avais adorés gamin dans les années 80. Mais, comme j’ai d’abord imaginé Ma famille et le loup en film d’animation, les premières images qui m’ont traversé l’esprit sont celles des films d’Hayao Miyazaki, comme Mon voisin Totoro, pour sa manière unique de raconter la réalité à travers la magie et la poésie des enfants. C’est en tout cas ce vers quoi j’ai cherché à tendre avec Nocturna comme avec Ma famille et le loup.

Ma famille et le loup a reçu l'aide au développement de projets de long métrage, l'avance sur recettes avant réalisation et l'aide à la Création Visuelle et Sonore du CNC.