Figure marquante d’une lignée cinématographique, Jacques Dorfmann s’est éteint le 27 août 2025 à l'âge de 79 ans, laissant derrière lui une filmographie singulière marquée par la passion, l’éclectisme et l’ambition culturelle. Né le 2 décembre 1945 à Toulouse, il était le fils du célèbre producteur Robert Dorfmann – figure centrale du cinéma d’après-guerre, à qui l’on doit des classiques comme Jeux interdits de René Clément ou encore Le Corniaud et La Grande Vadrouille de Gérard Oury.
C’est à l’ombre de ce géant du septième art, qu’il fit ses armes, supervisant à seulement 25 ans la production du film mythique de Jean-Pierre Melville, L’Armée des ombres (1969), et enchaînant l’année suivante avec Le Cercle rouge (1970).
Au début des années 1970, Jacques Dorfmann affirme son indépendance artistique en rachetant Belstar Productions et en développant une filmographie marquée par une grande diversité. Il produit des films d’auteur tels que Traitement de choc d'Alain Jessua, Souvenirs d’en France d’André Téchiné, ou encore Sept morts sur ordonnance de Jacques Rouffio – mais aussi des comédies populaires comme Les Charlots contre Dracula de Jean-Pierre Desagnat ou Le Grand Fanfaron de Philippe Clair.
Son plus vaste succès international survient en 1981 avec La Guerre du feu, réalisé par Jean-Jacques Annaud : un récit préhistorique empreint de spectacle et de poésie, couronné d’un César du meilleur film.
Mais Jacques Dorfmann ne s’est pas contenté de produire : il devient réalisateur et scénariste. En 1987, il signe Le Palanquin des larmes, coproduction franco-chinoise inspirée de l'autobiographie de la pianiste Chow Ching-Lie. Il réalise ensuite Agaguk (1992), tourné dans le Grand Nord canadien, avec Donald Sutherland et Toshiro Mifune. En 2001, ce sera l’aventure Vercingétorix : La Légende du druide roi, qu’il produit, écrit et réalise.
Ses œuvres étaient portées par une sensibilité qu’il revendiquait volontiers. Sa note d’intention de Vercingétorix portait en exergue cette phrase de Fernando Pessoa : « Je ne peux vouloir être rien. À part ça je porte en moi tous les rêves du Monde. » Une citation qui éclairait son approche poétique du monde, de l’art et de son métier.
À travers des films variés – du drame historique au péplum identitaire, de la comédie légère à la fresque intime – Jacques Dorfmann a incarné la figure de l’auteur-producteur, capable de rêves autant que de frissons, capable surtout de servir la diversité du cinéma français avec énergie et générosité.
Son héritage perdure via sa fille, Marine Dorfmann, et son fils Anthony Dorfmann, également engagés dans l’industrie cinématographique. Le cinéma français perd avec lui un bâtisseur éclectique.