Stéphan Castang : « Vincent doit mourir s’est fait de façon très collective »

Stéphan Castang : « Vincent doit mourir s’est fait de façon très collective »

14 novembre 2023
Cinéma
Vincent doit mourir
« Vincent doit mourir » réalisé par Stéphan Castang Capricci Films

Avec Vincent doit mourir, le cinéaste, également comédien au théâtre, signe son premier long métrage. Il raconte comment il a imaginé ce film de genre protéiforme qui mêle comédie, romance, thriller et fantastique.


Vincent doit mourir sort dans une période où le cinéma fantastique revient en force dans l’Hexagone, avec notamment Acide, Le Règne animal ou Mars Express (le 22 novembre prochain). Comment l’expliquez-vous ? Et vous revendiquez-vous du film de genre ?

Le genre, quelque part, je m’en fiche un peu. Je crois qu’il n’y a pas lieu de s’en revendiquer ou de s’en désinscrire. Mais le fait est qu’il y a une volonté conjointe de bon nombre de corps de métier du cinéma – des cinéastes, des distributeurs, des producteurs – de proposer d’autres choses. Cela fait un moment déjà et je crois que ça monte en puissance. À mon avis, c’est en partie parce que la cinéphilie des cinéastes évolue : il y a peut-être moins de hiérarchie, d’objets « nobles » et d’autres plus « série Z ». Ma cinéphilie va de Bresson jusqu’à ces nanars que je trouvais dans les vidéoclubs ! Je pense qu’il y a également l’envie de rendre compte de notre époque en s’affranchissant de la chape de plomb du réalisme, qui est très présente depuis un certain temps ! (Rires.) Mais plus que pouvoir s’échapper du réalisme, c’est presque une volonté de s’éloigner du cinéma d’intention. D’être davantage dans un cinéma de mouvement, où les corps agissent et où, fatalement, la puissance du cinéma peut agir. On ne traduit pas en images une littérature. Il s’agit plutôt d’essayer de construire des objets qui ne peuvent être que du cinéma et qui ne peuvent se raconter qu’à travers le cinéma.

 

L’ombre de John Carpenter plane sur Vincent doit mourir. Est-ce un cinéaste important dans votre cinéphilie ?

Oui, John Carpenter est une figure tutélaire. Invasion Los Angeles (1988) m’a particulièrement guidé pour réaliser Vincent doit mourir. Son côté paranoïaque et sa dimension ironique m’ont inspiré mais le film me parlait aussi parce que l’acteur principal est un catcheur : il y a également à l’œuvre dans le film la question des combats et d’une certain physicalité. J’ai aussi en tête le George A. Romero des débuts, notamment The Crazies, où il refuse d’expliquer pourquoi les gens deviennent fous. Il montre simplement comment les humains réagissent. Je voulais que Vincent doit mourir dépasse rapidement la question du « pourquoi ? ».

Vincent doit mourir est un film en mutation, avec une évolution assez nette au moment où le personnage de Vimala Pons arrive dans l’histoire. Une forme de romance s’installe. Comment avez-vous créé cette rupture de ton sans pour autant perdre l’ambiance déjà mise en place auparavant ?

Je voulais qu’il y ait une mutation dans le film. Il y avait deux dangers avec Vincent doit mourir : le premier était de se situer uniquement dans un film concept, et on a réussi à solutionner le problème au moment de réécrire le scénario. Le second était de passer d’une scène d’action à une scène d’amour, puis à une scène de comédie. Il ne fallait pas que le changement soit aussi net. Je voulais qu’au fur et à mesure, les choses se superposent et que le film existe dans cette tonalité-là. Sauf que cela reste très théorique. En fait, ce ton se trouve à la fois à l’écriture et pendant le tournage, avec toute l’équipe. On a vraiment réalisé un film de troupe. C’est sûrement mon passif de théâtre qui veut cela, mais Vincent doit mourir s’est fait de manière très collective. C’est une chose invisible, mais qui passe d’une façon ou d’une autre auprès du spectateur. Elle donne une forme de ciment au film. Je rends aussi hommage à ma monteuse, Méloé Poillevé, avec qui on est passé par des moments très réjouissants mais aussi parfois difficiles. (Rires.) Et puis il y a eu la première scène de rencontre entre les personnages de Vimala Pons et Karim Leklou. Une scène extrêmement compliquée à jouer parce qu’un coup de foudre au cinéma, c’est une « tarte à la crème ». Mais ce qui me plaît, c’est que ce qu’on voit à ce moment-là, c’est autant le coup de foudre amoureux des personnages que le coup de foudre artistique de Karim et Vimala.

 

Vincent doit mourir

Vincent doit mourir Capricci Films

Réalisé par Stéphan Castang
Scénario : Mathieu Naert
Adaptation et dialogues : Mathieu Naert, Dominique Baumard, Stéphan Castang
Production : Capricci, Bobi Lux
Coproduction : Arte France Cinéma, Gapbusters
Ventes internationales : Goodfellas
Sortie en salles : le 15 novembre au cinéma

Soutiens du CNC : Aide au développement d'oeuvres cinématographiques de longue duréeAvance sur recettes avant réalisationAide à la création de musiques originales, Aide sélective à la distribution (aide au programme)