Un immense créateur s’est éteint. Je veux rendre hommage à Patrice Chéreau, et dire la tristesse infinie que je ressens à l’annonce du décès de ce génie dont l’œuvre nous a marqués à jamais, a bouleversé les formes de la création, et continuera de grandir et d’inspirer les futures générations.
Il a porté jusqu’à l’incandescence le talent des grands artistes, où recherche formelle et exploration du cœur humain, dans la douleur, le tourment, nous amenait à l’éblouissement d’une révélation pour chacune de ses œuvres. Expérimentateur audacieux et puissant, passant du scandale au triomphe, il a su faire partager son monde et nous faire redécouvrir la vie.
L’homme inquiet, sensible et humble, envoûtait par son charisme et la force de ses convictions, artistiques, politiques et humaines. Il a toujours défendu une création exigeante et tournée vers un large public. Il a été le fondateur et directeur de grandes scènes populaires, à Villeurbanne ou à Nanterre, à côté du metteur en scène qui a révolutionné à jamais l’approche du texte, de la scène, l’expression des corps. Il a offert au public les révélations d’un répertoire moderne, la découverte de jeunes auteurs et acteurs, comme il a revivifié le répertoire plus classique.
C’est naturellement donc qu’il a insufflé aussi dans le cinéma la force de son univers, en le travaillant et le magnifiant dans tous ses registres, du spectaculaire le plus baroque à l’intimisme chuchoté. Ses films, comme ses mises en scène au théâtre ou à l’opéra, ont tous marqué la création. Ce sont autant de redécouvertes, de révélations sur le cinéma et sur l’homme, qui nous restent. Est-il besoin de rappeler l’Ours d’or de Berlin pour Intimité, l’Ours d’argent pour Son frère, ou le grand prix du jury à Cannes en 1994 pour La Reine Margot. Patrice Chéreau nous laisse une œuvre immense, forte et bouleversante.
photo : © PQR/La Voix du Nord/Maxppp
