La Cinémathèque française accorde une rétrospective au cinéma corrosif et social de Shohei Imamura

La Cinémathèque française accorde une rétrospective au cinéma corrosif et social de Shohei Imamura

13 avril 2022
Cinéma
« La Ballade de Narayama » de Shohei Imamura a reçu la Palme d'or à Cannes en 1983.
« La Ballade de Narayama » de Shohei Imamura a reçu la Palme d'or à Cannes en 1983. The Jokers

Le réalisateur japonais doublement palmé pour La Ballade de Narayama (1983) et L'Anguille (1997) sera mis à l'honneur jusqu'au 7 mai 2022 sur les grands écrans de l'institution parisienne.


En près de 50 ans de carrière, le cinéaste nippon Shohei Imamura a construit une œuvre provocatrice et grinçante, adoptant inlassablement le point de vue des laissés-pour-compte de la société. Une filmographie résolument sociale et baroque à redécouvrir dans une rétrospective à la Cinémathèque française. Jusqu'au 7 mai prochain, les spectateurs pourront notamment se replonger dans ses débuts derrière la caméra avec Désirs volés (1958) - où Imamura filme le quotidien et les déboires d'une troupe de théâtre kabuki itinérante - et Désir inassouvi (1958). Cette fable cruelle et violente voit un groupe de vétérans tenter de récupérer un stock de morphine enterré durant la guerre et, dans la veine tragique, inéluctablement s'entretuer pour le contrôle de ce triste butin. Le journaliste des Cahiers du Cinéma Clément Rauger, grand spécialiste du cinéma japonais, présentera un documentaire phare d'Imamura le 13 avril : Histoire du Japon racontée par une hôtesse de bar (1970). Dans ce film, le cinéaste conte l'histoire du Japon de l'après-guerre à travers les réminiscences d'une tenancière de troquet et son ressenti personnel face aux chamboulements d’une nation entière.


Les cinéphiles ne passeront pas à côté de ses longs métrages incontournables et cyniques tels que Le Pornographe (1966), dans lequel Shohei Imamura poursuit son étude de la figure de l'outsider grâce à ce portrait de réalisateur de films X, menacé par le gouvernement et les petites frappes de la mafia d'Osaka. Un des films d'Imamura les plus connus hors des frontières nippones avec ses deux palmes d'Or : La Ballade de Narayama (1983) et L'Anguille (1997). Le premier film, ancêtre distant du Midsommar (2019) d'Ari Aster, revient sur la tradition « ubasute » d'un hameau isolé dans le Japon des années 1860 - une coutume voulant que les villageois s'en aillent mourir au sommet du mont Narayama à leur 70e anniversaire. Réalisé 14 ans plus tard, L'Anguille s'attarde sur le destin d'un gérant de salon de coiffure mutique, libéré huit ans après avoir tué sa femme, avec une anguille recueillie en prison pour seule confidente. Le journaliste Stéphane du Mesnildot, éminent expert du cinéma asiatique, donnera quant à lui une conférence le 21 avril prochain intitulée « Shohei Imamura, la révolte de la chair ». Une exploration des damnés du Japon de l'après-guerre dans l'objectif d'Imamura, suivie de la projection de La Femme-insecte (1963), chronique de la vie d'une miséreuse condamnée à se prostituer pour survivre.